❝ But in the end, everyone ends up alone ❞« Voici votre fils... mais... » Il n'écoutait pas, perdu dans la contemplation d'Ergaïl. Ce prénom était son choix, sa femme aurait voulu l'appeler Nathaniel, mais elle avait finalement cédé. Son petit garçon... Soudain, il se demanda pourquoi sa femme ne disait rien, pourquoi toute cette agitation parmi les infirmières et médecins. Levant les yeux, il croisa le regard désolé du médecin, Et il su, avant même de se l'être entendu dire, avant de l'avoir vu. Il remercia le ciel que son fils ne soit pas dans ses bras à cet instant, il l'aurait lâché. Morte... Il n'entendit pas le ' Je suis désolé ' et la suite du blabla du médecin. Il n'entendit plus rien.
« Papa ! Hey, papa ! » Nathaniel souriait de toutes ses dents, fou de joie de retrouver son père après une – très longue – journée d'école. Il avait sept ans et était plus proche de son père que n'importe qui. Pas seulement car il n'avait que lui depuis toujours, mais parce que cet homme était son modèle, son père, son frère, son ami. « Je... Désolé, je pensais à ta mère, Er... Nat'. » Le garçon perdit son sourire et se stoppa net, son regard fixé sur son père, il semblait comme paralysé. « Tu as voulu m'appeler comment ? » Son père fut totalement déstabilisé. « Er... Ergaïl, je voulais t'appeler comme cela. » Le garçon sourit. « C'est joli. Mais Nat' c'est mieux. »




❝ You and I, we had it all. I wonder why, I let it fall.I don't know why, I make this hard for you. ❞« La première fois ? Je... » Nathaniel réfléchit un instant, puis un sourire dépourvu de toute émotion passa sur ses lèvres, il reprit d'un voix sans âme. « La première fois, je me suis mis à raconter n'importe quoi, des trucs incompréhensibles. Je convulsais, je tremblais. Je crois même que je me suis mis à pleurer... A ce moment là, l'épilepsie n'était pas un diagnostique très répandu, on pensait plus vite à des possessions. Ma très croyant grand-mère a tenté de me faire exorciser, et j'ai eu beau me débattre et dire que je n'étais en aucun cas possédé, elle m'a traîné de force jusqu'à l'une de ces foutues églises. J'avais cinq ans, je me rappelle juste de que j'ai de nouveau criser en voyant le monde qui s'agglomérait autour de moi, m'oppressait... » Nat' ne put réprimer un léger soupire. La jeune allemande assise à ses côtés tenta un sourire. En vain. La réaction de Nathaniel ne tarda pas, il lâcha la main de la jeune femme, commença à s'éloigner. Tous les mêmes, à vouloir en savoir plus et à le regretter. Tous à s'assurer capable de tout entendre, et se retrouvant finalement comme paralysé. « Nat' ! Nat', attends ! » Il secoua la tête sans même daigner se retourner. Attendre quoi ? De toutes manières, il quitterait bientôt l'Allemagne. Il la quitterait. Et, lorsque cela arriverait, cela ne changerait rien qu'ils soient en bons ou mauvais termes.Ils ne se reverraient plus. « Mais bordel Nat', tu peux pas comprendre que ça me gêne ne serais-ce qu'un peu ? Que... » Il s'était enfin retourné, lui jetant un regard noir qui la fit taire presque instantanément. « Non, je peux pas. Tu as demandé, je t'avais prévenue que cela ne te plairait pas, tu as insisté. Et non, je ne peux pas comprendre, je te rappelle que je suis malade mental, désolé si ça te gêne. Oh, et puis tu sais quoi, dans un élan de pure folie, je te signale que, toi comme moi, sommes dorénavant célibataires. Je te souhaite de te trouver quelqu'un de normal, ça te changera. »




❝ Can anybody hear me ? Or am I talking to myself ? My mind is running empty in the search for someone else who doesn’t look right through me. ❞
« Nat', regarde moi, Nat' ! » Le jeune homme convulsait presque, couché par terre, ou plutôt tombé, il racontait... mais que racontait-il ? Cela ne semblait même pas être une langue, ou, en tout cas, plus parlée de nos jours... Son père était accroupi à sa droit, impuissant, souffrant de voir son fils dans cet état mais n'y pouvant absolument rien. Attendant que cela passe. Les gens étaient de plus en plus nombreux autour d'eux, ce qui n'arrangeait rien à la crise de Max. La crise durait, les badauds s'accumulaient. Ils n'avaient rien d'autre à faire... Jusqu'à ce qu'une femme les disperse, d'une manière dont le jeune homme ne se souvient pas... Il commença à se calmer, doucement. Lentement mais sûrement. Le flot de paroles inintelligibles s'était stoppé assez rapidement, il cessa de trembler. Il inspira longuement, toussa, manqua de s'étrangler. La femme s'approcha et il reconnu... sa mère ? Il s'assit, recula. La lumière du soleil l'aveugla et, se levant, il voulu partir. Loin de là, loin de cette foule de débiles qui n'avaient rien d'autre à faire que le regarder criser, loin de cette femme, finalement reconnue comme étant sa tante, mais lui ressemblant tellement... « J'en peux plus. » Son père le dévisagea sans comprendre. Il ouvrit la bouche pour parler, la referma en voyant que Nathan allait poursuivre. « J'me tire, je ne supporte pas le Brésil. Je déteste ces gens qui n'ont rien d'autre à foutre que me regarder comme un animal curieux, étrange, nouvellement découvert. Bordel, j'suis épileptique et ouais, ma mère est morte à cause de moi ! Merde. » Il pénétra dans la maison, attrapa son sac, y fourra un peu tout et n'importe quoi puis appela un taxi en ressortant. « Nat', réfléchis un peu voyons... » Son regard se posa sur son père et, bizarrement, il se radoucit. « C'est tout réfléchi, il me fallait seulement une bonne excuse, j'aime pas ce pays, j'aime pas ces gens qui me regardent comme... un monstre. Malgré tout ce que tu pourras dire, je ne serais jamais chez moi. C'est le pays de maman, pas le mien. Et encore moins le tien, si tu veux mon avis... » Quelques jours plus tard, il était à Jersey. L'Allemagne, Cologne, cela n'aurait rien arrangé. Il lui fallait une sorte de dépaysement...