Tu es perdue. Totalement seule. Voilà comment tu te sens. Ce matin, en parlant avec une de tes choristes, elle a mentionné vouloir un enfant, et là, tout est allé si vite. En retard. Tu es en retard. De deux semaines et ça ne t'es jamais arrivé. Tout de suite, tu as commencé à avoir des nausées et à imaginer le pire. Tes anciennes peurs te reviennent en mémoire. Ton ancienne grossesse, l'adoption, l'horreur de quitter ton enfant. Ce cauchemar que tu as vécu pendant neuf mois. Neufs long mois. Tout cela recommence et tu as terriblement peur. Tu ne réfléchis pas et tu te rends à la pharmacie. Tu achète un test de grossesse et rentre dans ta chambre. Là-bas, tu y reste, assise sur ton lit, la boule au ventre, à fixer ce test. Tu es restée là toute la journée. Tu n'as rien fait d'autre que d'imaginer le pire, et pourtant, tu n'es même pas sûre d'être enceinte. Enfin tu te décide. Et puis, tu fais marche arrière, tu ne peux pas faire ça toute seule. Tu as besoin de lui. Tu as besoin d'Isaac. Plus que n'importe qui d'autre. Tu prends ta voiture, roule jusqu'à son dortoir et ce n'est qu'une fois sur place que tu te rends compte qu'il est déjà deux heures du matin. Peu importe, tu dois le voir. Tu en as besoin. Tu frappes à sa porte, tu n'es même pas sûre qu'il voudra te parler mais tu en as besoin, c'est vital. Dans la voiture, tu as pleuré, tu as eu peur, tu as même failli avoir un accident en brûlant un feu rouge. Mais peu importe, tes cauchemars refont surface et tu as besoin de lui en parler. Personne n'est au courant, même pas ton meilleur ami. Non personne... Et pourtant, tu as envie de lui dire. Parce que tu le sais, depuis qu'il a pris ses distances. Tu es amoureuse de lui.

Après un dîner improvisé et assez tardif avec sa jumelle, Isaac l'avait brièvement déposé à son dortoir. Il avait sans doute voulu éviter Sahara, lâchement ; et pour cause il avait comme inconsciemment décidé que sa seule manière de relativiser était tout simplement de la laisser venir à lui quand elle le voudrait. C’était peut-être ainsi, et maladroitement, qu’il pensait pouvoir évaluer l’attache qu’elle lui portait. Mais apparemment ce n’était pas pour ce soir. Il avait traîné dans la salle commune assez longtemps avant de rejoindre son dortoir à près d’une heure du matin, alors que beaucoup semblaient vouloir encore prolonger les discussions, les rires et les débats. Wheeler lui, avait grattouillé sa guitare, après une douche nocturne comme il les aimait occasionnellement avant de se glisser dans son lit pensant pouvoir s’endormir s’il se concentrait assez. Sans espoir ! Ce dortoir manquait de vie. C’était ce qu’il pensait, mais dans le fond, il n’était qu’ampli d’amertume, et son égo un brin froissé encore aujourd’hui. C’était affreux, mais il aurait aimé que tout cela se passe autrement. « Sahara ? » C’était bien à elle qu’il pensait avant de s’être dirigé vers cette porte, et elle était là, à pas moins de deux heures du matin dans un état qui lui semblait bien plus inquiétant qu’autre chose. C’était d’ailleurs ce qui retirait toute prétention au jeune homme. L’envie qu’il avait eu de la pousser à venir à lui ces derniers jours, ou même encore ce soir semblait étouffée face à la mine inquiétante de la demoiselle. Au contraire, il avait soudainement la crainte que tout cela ne soit que mauvais présage. La dernière fois qu’il l’avait vu les yeux rougeâtres elle lui avait énoncé sa culpabilité suite au fameux baiser. Elle avait pleuré ardument, il en était persuadé. L'incitant à entrer pour vite refermer la porte il finit par dire. « Hé.. qu'est-ce qui n'va pas ? » Sans broncher, la seule chose qu'il ait pu faire instinctivement c'était glisser son index sous le menton de la demoiselle, menant ainsi son pouce à sa joue après avoir aligné deux pas en sa direction. La fuir ne semblait pas lui être impossible, pourtant la voir ainsi suffisait à le faire fléchir.

Quand il ouvre la porte, c'est comme si tes poumons retrouvaient leur oxygène, comme si ton cœur recommençait à battre. Tout ton monde s'était arrêté lorsqu'il t'avait "quitté" ce soir-là, sur la plage. Et rien que de pouvoir à nouveau plonger ton regard dans le sien, te rendait plus sereine, plus vivante. Tu te sentais incroyablement vide sans lui. Bien que ça ne fasse pas très longtemps entre vous, il avait su te montrer que le monde pouvait être meilleur à deux, ce dont tu doutais depuis un moment déjà. Il t'avait montré à quel point tu pouvais être aimée. Il t'aimait. Du moins, quand il te prenait dans ses bras, quand il t'embrassait et quand il te faisait l'amour, tu te sentais terriblement aimée. « Sahara ? » Le son de sa voix t'avais terriblement manqué aussi mais encore plus ses lèvres, tu as envie de te jeter à son cou et de retrouver ses lèvres mais ce n'est pas possible. Il ne veut plus de toi, tu en es persuadée... Il t'a donné ta chance et tu l'as gâchée. C'est trop tard. « Hé.. qu'est-ce qui n'va pas ? » Tu avances lorsqu'il t'incite à entrer et lui tourne le dos. C'est plus facile comme ça. Je... Je te demande pardon, tu ne voulais sans doute pas me voir mais... Je suis perdue Isaac je suis... peut-être... Tu ne parviens pas à le dire alors tu sors de ton sac le test de grossesse et lui tend. Tu ne l'as pas encore fait mais tu en as l'impression. Tu as peur terriblement peur. Je ne peux pas affronter ça seule... encore une fois. Dis-tu en te retournant à nouveau vers lui et en plongeant ton regard dans le sien. Il ne sait pas pour l'adoption mais tu es prête à tout lui dire. Tu as envie de te jeter dans ses bras mais tu garde la distance, tu as bien trop peur qu'il te repousse. Tu ne le supporterais pas.

Il pouvait très certainement le reconnaître sans trop de mal. Depuis cette fameuse annonce, il ne cessait de repenser au moment où il lui avait dit qu'il n'aimait pas perdre son temps quand il s'agissait d'histoire de coeur. S'enticher pour une demoiselle au point de vouloir vivre une histoire avec elle, ce n'était pas rien pour Wheeler, loin de là. Et à ce jeu-là, Sahara avait fait de lui l'heureux perdant ; mais la peur de la voir lui faire regretter cette décision n'avait fait que doubler suite à son aveu. Il se sentait comme vulnérable, et détestait ce sentiment à tel point que la voir lui tourner le dos une fois de plus avec ses mots lui faisait s'attendre au pire. Et paf ! Le verdict était tombé. Pas bien sûr, il fit un pas vers elle et prit le test en main. « Tu l'as déjà fait ? » Demanda-t-il en se rendant compte que l'emballage était fermé. Je ne peux pas affronter ça seule... encore une fois. Et d'un coup tout ce qui semblait être si simple entre eux les premiers temps n'étaient plus que souvenirs. Tous ces moments lui manquaient affreusement. Cette simplicité, ce sourire sur les lèvres de la brunette, ce rire pour lequel il avait craqué et qu'il aimait tant provoquer pour se faire plaisir. « Encore une fois ?! » Stupide. Était-ce si important à ce moment précis ? Oui, peut-être. « Calme toi, tu.. on va le faire pour commencer, y'a que comme ça que tu seras fixée. » Finit-il par dire en baissant volontairement d'un ton sait-on jamais si des oreilles traînaient. Il se voulait encore par habitude protecteur, prévoyant et tentait malgré lui d'atténuer les choses pour la pousser à se calmer mais au fond il avait déjà eu le temps d'envisager toutes les situations possibles, silencieusement, et il n'en était que plus perturbé.

Oui, tout était si simple entre vous au début. Peut-être auriez-vous mieux fait de laisser votre relation comme telle ? Peut-être auriez-vous dû garder vos limites ? Non. Tu es persuadée que tu as pris la bonne décision en te jetant à l'eau avec Isaac. Même si une fois de plus, tu as tout gâché. Contrairement à toi, Isaac reste le même qu'il l'était au début. Attentionné, drôle, gentil. Et même là, alors qu'il te veut sans doute énormément, il est là pour toi et ne te repousse pas. Tu sens tout de même une certaine distance entre vous deux et tu déteste ça. Tu te déteste pour ça. Tu le sais, tu es la seule fautive. Il prend le test en main et te demande si tu l'as déjà fait. Tu n'aurais pas pu le faire seule, ça non. Non j-j'ai pas pu. C'est alors que tu mentionne le mot "encore" en parlant de grossesse. Oui, tu as déjà été enceinte et peut-être qu'Isaac n'aurait jamais voulu le savoir. Mais pourtant, toi, tu as besoin de lui dire. Tu es égoïste, comme toujours. Tu marche jusqu'à son lit et t'assieds dessus, inspirant pour tout lui expliquer. A l'âge de 16 ans, j'ai touché à la drogue et j-j'ai couché avec mon dealer ou plutôt il a profité de moi. Et bien sûr, on ne s'est pas protégés. Il a fallu d'une fois et j'étais enceinte... J-j'ai fait adopté le bébé. J'étais seule. Terriblement seule et j-je ne suis pas prête à revivre ça Isaac. Tu te lève alors, te rapprochant de lui et posant tes mains sur son torse. Tu plonge ton regard dans le sien, voulant t'y noyer. Son ton est protecteur mais toujours un peu réservé. Il t'en veut toujours. Tu le sais, tu le sens. Oui, j-je dois le faire mais s'il s'avère positif... qu'est-ce qu'il va se passer Isaac ? Tu ne détourne pas ton regard du sien, ta vue se brouille, les larmes t'envahissent mais tu les retiens. Tu ne veux pas te montrer faible devant lui, une fois de plus. Tu as besoin de lui mais s'il a fait un trait sur toi alors autant faire de même, non ? J'aurais pas dû venir te déranger avec ça, je... je suis désolée. Pour tout. Pour le baiser, pour cette nuit sur la plage, pour toi. Tu es vraiment désolée pour tout même si à présent, ça ne change plus grand chose.

Égoïste, Isaac l'était aussi. Et pour cause, il osait espérer que ce 'encore' n'avait rien à voir avec un passé trop récent. Il devenait très certainement un tantinet parano. Jaloux de nature, il l'était d'autant plus quand il craignait ce qui se cachait dans l'inconscient de la demoiselle. Seize ans.. dealeur.. profité de moi C'était bien loin dans le temps, loin de lui ; et soudain, il se sentait presque honteux d'avoir pu craindre ce passé. Ses sourcils se froncèrent en l'entendant. Inquiet, révolté, abasourdi, et presque admiratif de la force silencieuse qui régnait en elle. Ses mains se déposèrent sur les siennes non pas pour les retirer de son torse, mais en simple signe de soutien. « Chuut.. arrête calme toi. T'es pas seule cette fois, tu le sais. » Je suis là, aurait-il dû ajouter. Mais sans trop savoir pourquoi il était sur la retenue. C'était son bouclier, même si ce même bouclier avait aussi été une manière de punir injustement Sahara. Il voulait sentir qu'elle était avec lui complètement, et qu'elle ne se sentirait jamais frustrée de ne pas avoir été avec d'autres, avec un autre Oui c'est le sentiment qu'il avait eu. « Arrête avec ça, ne dis pas de bêtises.. et si vraiment c'est positif on... on improvisera. » Ce n'était clairement pas dans l'idéal tant imaginé par Isaac. Il avait toujours rêvé d'aimer comme ses parents s'aiment, et de fonder une famille mais pas sitôt et de manière si impromptue sans compter que tout était récent, et surtout pas si rose qu'on ne le pense. « Maintenant si tu dois te descendre un litre de jus d'orange avant de pouvoir faire ce test, on ira se saouler au jus d'orange tous les deux.. et après ça, on sera fixé. » Il était con et en était conscient, mais elle lui écrasait le cœur par son état et par sa confidence qu'il n'avait jamais soupçonnée, alors oui faire le pitre pour calmer le jeu l'aidait aussi, lui, autant qu'il espérait que ça relativisait les choses pour interlocutrice. Naïf, mais le bon côté résidait indéniablement dans le fait qu'il semblait ne pas avoir perdu ce besoin de la faire sourire, même s'il n'en attendait pas autant à ce moment-là. Il déposa ses lèvres à son front pour un baiser avant de la regarder comme pour attendre son top départ.

« Chuut.. arrête calme toi. T'es pas seule cette fois, tu le sais. » Non, tu n'es pas seul. Isaac est là cette fois, même s'il ne l'a pas mentionné à haute voix, tu sais qu'il ne te laissera pas tombé. Il n'est pas comme ça, non le jeune Wheeler est tout ce qu'il y a de plus parfait avec toi. Alors que toi... Tu es bien loin de la perfection, tu ne comprends même pas comment est-ce qu'il peut être encore si parfait avec toi. Tu sens ses mains contre les siennes et c'est assez pour te rassurer. Tu plonge ton regard sur vos mains liées comme si c'était la clé de tout, comme si ça pouvait tout résoudre. Mais au fond, tu sais que ce n'est pas si simple. « Arrête avec ça, ne dis pas de bêtises.. et si vraiment c'est positif on... on improvisera. » Improviser c'est ce que tu sais faire de mieux. Tu plonge ton regard dans le sien. Isaac est parfait. Bien trop parfait pour toi ; tu ne le mérite pas. Oui t-tu as raison. Merci d'être là Isaac... Dis-tu en soutenant son regard et en ne lâchant pas ses mains. Tu souris lorsqu'il te propose d'aller te saouler au jus d'orange avant. Mais il est temps de savoir, temps de mettre un mot sur la situation. Enceinte, ou pas ? Et si tu ne l'es pas ? Que va-t-il se passer pour lui, pour toi, pour vous ? Tu as peur que si le test s'avère négatif, il te déteste à nouveau et te "quitte" une seconde fois. Tu ne veux pas que le test soit positif non plus et pourtant, ça arrangerait bien des choses entre vous. Tu le regarde à nouveau, le regard inquiet. Non, je vais le faire... Je reviens. Dis-tu en te dirigeant vers les toilettes. (...) Une minute plus tard, tu te diriges vers lui, les yeux posés sur le test. Ton expression est indéchiffrable. Tu relève la tête et plonge ton regard dans le sien. Négatif.

Isaac n'était pas encore au stade où il pourrait s'en vouloir de prendre ses distances, et pourtant même en tentant de moins s'investir, il refusait presque qu'elle puisse le remercier d'être là. Il aurait voulu que cela soit normal. Qu'elle ne se sente pas l'obligation de l'en remercier, et qu'il ne se sente pas en conflit intérieur avec lui-même. Bien sur qu'il avait cette envie de la prendre contre lui, d'humer le parfum de chevelure, de caresser sa peau de ses lèvres, et ce tout autant qu'il voulait être dans ses bras. Mais la raison le lui refusait. Il se connaissait que trop bien. S'il choisissait de s'investir à deux cent pour cent comme il l'avait voulu et qu'il finissait par se prendre une plus grosse claque que celle du baiser, ou des dires de Teddy, il ne pourrait s'en prendre qu'à lui-même. Mais encore une fois ce simple sourire timide avait suffit à lui donner du baume au cœur. Il la regarda se diriger vers la salle de bain, et s'installa sur son lit pensant à tout comme à rien avant de la regarder. Il ne voulait pas réfléchir avant d'être fixé. « C'est plutôt une bonne nouvelle, non ?! » Devait-il se sentir désolé que ce fameux test soit négatif ?! Sûrement pas, et pourtant ça semblait ne rien arranger. Le malaise était vite de retour. Ce blanc, qui le poussait perpétuellement à se demander si elle n'était pas avec lui que parce que les circonstances le voulaient. Le regard d'Isaac s'abaissa comme s'il se tâtait de passer aux aveux. Hésitant il finit par dire, comme pour justifier son comportement auprès d'elle. « Pourquoi est-ce que tu ne m'as pas parlé de ton accident, et de tes journées dans le coma ? » Nostalgique des moments où il venait perpétuellement la sortir de ses déboires infantiles, il craignait qu'elle n'ai rien dit à cause de ce qui s'était passé avec Teddy, ce jour-là. Parce que oui, il savait tout, mais qu'importe ils n'avaient pas été ensemble à ce moment-là mais dans le fond ça ne l'avait que poussé à mieux comprendre ce baiser, et à mieux éveiller sa plaie.

Tu ne sais pas bien pourquoi mais tu te sens vide. Vide parce que tu ne sais pas ce qui va vous arriver maintenant ; à toi et Isaac. Tu le sens s'éloigner et tu déteste ça, tu as besoin qu'il soit près de toi plus que n'importe qui. Plus que Teddy encore mais ça, le jeune Wheeler ne veut pas le comprendre. « C'est plutôt une bonne nouvelle, non ?! » Tu hésite un instant. Certes, c'est une bonne nouvelle car tu ne te sens pas prête pour être mère du moins pas dans ses conditions mais tu ne parviens pas à mettre un mot sur ce que tu ressens. Tu acquiesces d'un petit signe de tête, un léger sourire aux lèvres. Puis, tu vas te poser sur le lit, en face d'Isaac, l'observant. Tu aimes chacun de ses traits, de ses yeux à ses lèvres, à son cou, tu aimes tout de lui. Tout. Tu t'étais sentie obligée de lui dire pour le baiser et pourtant, ça a tout gâché. Et puis, comme une bombe, Isaac te demande pourquoi tu ne lui as pas parlé de ton accident. Tu fronce les sourcils. Comment peut-il être au courant ? A vrai dire, tu n'en as parlé à personne. Tu n'as pas jugé utile de lui dire mais il va sans doute prendre ça comme une seconde "trahison" concernant Teddy. Il va encore croire que tu l'aimes encore et s'éloignera un peu plus (...) J-Je ne sais pas. J'ai pas trouvé ça important enfin si mais j'ai voulu rayé ce moment de ma vie et j'ai pas trouvé le bon moment pour t'en parler. C'est comme l'adoption de mon bébé, ça se dit pas devant un repas tu comprends ? Tu marques une pause, hésitante. Ne crois pas que ça a encore avoir avec Teddy. Je ne ressens plus rien pour lui Isaac, tu dois me croire...

Peut-être que dans le fond, Wheeler n'avait qu'une envie la prendre dans ses bras, la réconforter jusqu'à lui faire oublier tout ce qui la tracassait. Il le savait, c'était son rôle. Il en avait envie, et pourtant il se sentait comme retenu sans trop pouvoir aller de l'avant. Et si ? et si ? et si ? et si Teddy ? C'était exactement ce qui le retenait. Il avait mal pris l'annonce du baiser, mais celle de l'instant charnel suivi d'un accident et d'une amnésie simulée n'avait rien arrangé, surtout quand il l'avait appris par Teddy. Se laissant tomber en arrière, il s'allongea sur le dos et finit par dire ou plutôt par murmurer. « T'es certaine de ça ?! » Tout était tellement compliqué. Tellement qu'il en venait à se demander si la grossesse de Candace n'était pas la raison pour laquelle Sahara pensait que Teddy relevait du passé. Mais Wheeler était aveuglé par ses craintes, et par sa tendance presque maniaque à vouloir toujours être prévoyant, parfois un peu trop. Prenant appui sur son coude, il casa sa tête dans sa main droite, et prit la main de sa petite amie de sa main gauche... timidement, discrètement. « C'est le meilleur ami que j'ai ici.. j'y tiens comme un petit frère ; je ne supporterai pas de continuer pour finalement te voir lui tomber dans les bras, ensuite. Je tiens beaucoup trop à cette amitié Sahara... tout comme je tiens à toi.. » Tomber amoureux, collectionner les bons moments avec elle, prendre le temps de se poser sérieusement avec elle pour au final la voir se rendre compte qu'elle voulait Teddy ? Il savait qu'il ne finirait que par détruire ses relations avec eux s'il laissait cela arriver. Caressant sa main de son pouce inconsciemment voir même naturellement, il finit par ajouter. « ..et petit frère ou non j'ai pas pour habitude de partager. » Sourire, ou presque, il espérait qu'elle ne douterait pas l'espace d'un instant mais en attendant il n'en savait rien.

Mais contrairement à ce qu'Isaac pense, tu t'es fait une raison, s'il avait dû se passer quelque chose avec Teddy, tu n'aurais pas fini dans les bras du jeune Wheeler. Vous n'étiez pas fait pour être ensembles Charles et toi, c'était trop compliqué. C'est une évidence, il a compté pour toi et il fera partie de ta vie quoi qu'il arrive mais en ami, rien de plus. Alors qu'Isaac, tu sais très bien qu'il est plus que ça, jamais tu ne pourras l'imaginer en simple ami, jamais. Et de toute façon, tu sais pour Teddy et Candace mais tu n'en connais pas plus... S'ils sont heureux, tant mieux. Toi tu ne veux qu'une chose, le jeune homme devant toi et tu en es certaine alors lorsqu'il te pose la question, tu réponds naturellement : Oui, plus que certaine, c'est toi que je veux Isaac. Tu es sincère et tu plonge ton regard dans le sien pour intensifier tes paroles. Tu veux qu'il te croit, plus que tout ; parce que c'est réel, tu es réellement amoureuse de lui. Tu l'écoute, attentivement, sentant sa main se poser dans la tienne, tu laisse s'échapper un léger sourire ; tu aimes tellement le contact de sa peau. J'aurais pu tomber dans ses bras, avant. Mais ça, c'était avant de te rencontrer. Il y a eu ce baiser mais ça n'était rien d'important, crois-moi. Sinon, je ne serais pas là à essayer de te convaincre que c'est avec toi que je veux être parce que je tiens à toi bien plus que tu ne l'imagine. Tu espère qu'il te croira et qu'il pardonnera tes erreurs. Tu l'espère plus que tout...

Oh que non, Isaac n'avait pas pour habitude de partager, surtout quand il s'agissait d'une histoire comme celle qu'il voulait avoir avec Sahara. Il ne l'expliquait pas mais elle était le genre avec lequel tout était naturel, plaisant et simple. Du moins c'était la première impression qu'il avait eu et il voulait vraiment croire que c'était la bonne, cette impression. « Oui, plus que certaine, c'est toi que je veux Isaac. » Il ne lâchait plus des yeux, persuadé que maintenant si quelque chose de mal finissait par arriver il ne pourrait pas accuser la sincérité de la demoiselle. « Sinon, je ne serais pas là à essayer de te convaincre que c'est avec toi que je veux être parce que je tiens à toi bien plus que tu ne l'imagine. » On ne dirait peut-être pas comme ça, mais Isaac croyait en ce qu'on appelait le destin, et en la regardant il finissait par se dire que le mini massacre qu'avait été sa dernière rupture en date n'était peut-être que signe du destin en faveur d'une histoire bien plus sereine. « Je te fais confiance dans ce cas. » Finit-il par dire en la regardant un instant sans rien faire. Il aimait ce beau regard qu'était celui d'Harrington. Il ne l'avait certainement pas encore assez dit, et pourtant il se le répétait souvent en silence, et c'est d'ailleurs ce qui se tramait dans sa tête avant qu'il ne finisse par dire. « Approche. » L'attirant vers lui, il glissa ses lèvres contre les siennes pour un baiser tendre et sans retenue. Il avait incontestablement ressenti un manque ces derniers temps, elle lui avait manqué, bien qu'il n'en disait rien. Il espérait grandement ce retour à la simplicité, à la complicité. Rompant délicatement ce baiser, presque à contre coeur il finit par lui demander en un murmure en entremêlant ses doigt aux siens. « Tu as du retard depuis combien de temps ? »

« Je te fais confiance dans ce cas. » C'est la seule chose que tu avais envie d'entendre. Car si Isaac te fait à nouveau confiance, c'est qu'il y a peut-être une chance que tout recommence à zéro entre vous. Tu as envie qu'il te donne une seconde chance, tu as envie que ça marche cette fois. Plus que tout. Tu lui souris. Comme un signe de remerciements. Tu sais que ça doit être dur pour le jeune Wheeler de te croire. Toi même, tu ne sais pas si tu l'aurais fait dans le cas contraire, mais lui, encore une fois, il t'a pardonné. Cela te prouve que tu ne t'es pas trompée à son sujet, il est réellement l'homme qu'il te faut. L'homme que tu veux auprès de toi. L'homme que tu aimes. Tu n'as plus de doute. Il te fait signe d'approcher et tu ne te fais pas prier. C'est alors que tu sens ses lèvres contre les tiennes, ça t'avait tellement manqué. Un manque inimaginable, un manque insupportable. Tu ne te retiens pas non plus et prolonge un peu votre baiser. Tu profite comme si l'instant d'après, il ne serait plus là. Comme si tout ça n'était qu'un rêve. Tu m'as tellement manqué. Dis-tu en lui souriant. C'est alors qu'Isaac revient sur le sujet du bébé. Du retard depuis combien de temps ? Tu ne réfléchis pas bien longtemps, tu connais la réponse. Deux semaines... Tu penses que le test pourrait être faux ? Demandes-tu, inquiètes. Tu ne sais pas bien si tu dois te fier à cent pour cent au test, mais tu espère t'être trompée. Tu espère que ton retard n'est qu'un simple retard. Car tu n'es pas prête pour être mère. Tu ne le lâche pas des yeux et entremêlent tes mains aux siennes.

Deep down, Isaac était persuadé et conscient qu’avec une autre, tout aurait été différent. Différent mais sûrement pas mieux. Il n’aurait certainement jamais accepté de partager une quelconque demoiselle avec son meilleur ami si, à ses yeux, elle n’en valait pas la peine. Et encore, partager était-il vraiment le bon mot, après cette conversation ?! Elle semblait lui garantir qu’il n’y avait plus qu’eux : elle et lui, rien qu'eux ; et Wheeler voulait y croire. « Tu m'as tellement manqué. » Ses lèvres pour un léger sourire des plus authentiques. Il n’allait certainement pas le dire, mais il était heureux d’entendre ces mots. Elle ne pouvait que les penser, c’était ce qu’il percevait sans être foutu de le lui dire en retour. Néanmoins il la bouffait incontestablement du regard, et ce simple détail presque inconscient, témoignait pour lui de la réciprocité d'un tel aveux. Elle lui avait manqué, il avait espéré qu'elle lui viendrait à lui et même si ce n'était pas tant pour les raisons espérées, il était comme soulagé de la voir venir à lui en ce moment. « Je n'en sais rien.. c'est peut-être tout autre chose.. » Gardant ses doigts entremêlés aux siens, il la regarda un court instant avant d'ajouter. « Tu te mets peut-être beaucoup trop de pression ces temps-ci.. » En simple supposition, il regarda Sahara en se rendant compte qu'il n'était clairement pas foutu de dire de quoi avait été fait ces quelques derniers jours pour elle ; il se contentait donc de supposer sans même être certain de ce qu'il avançait.