Il court. Une seule idée en tête : retrouver Candace. Deux jours déjà qu'il est revenu. Deux jours qu'il la cherche sans la trouver, qu'il la croise sans réussir à la voir. Deux jours que son angoisse augmente. Il se souvient des quelques mots de Lea sur twitter. « Un fou nous a pris en otage, il y a eu des blessés, et des morts Teddy, j'ai tout vu.. » Sa jumelle aussi reste introuvable. Sahara aussi. Blessée, en plus, lui avait dit Eleanor. Son sang se glaçant, il est arrivé jusqu'à l'hôpital pour fouiller les lieux, en dernier recours. Traversant ces couloirs laiteux aux odeurs agressives. Il déteste les hôpitaux. Il n'a jamais aimé ça. Il passe une main nerveuse dans ses cheveux ébouriffés. Il a des galoches sous les yeux, et ses paupières, lourdes, trahissent son manque de sommeil en ce moment. Il pousse les portes, s'excuse, embrasse du regard ces visages connus qu'il a croisé à la fac, ou ailleurs. Il sent une boule lui emprisonner la gorge. Soudain, il en pousse une autre et reste figé sur le seuil. Sahara. Omnibulé par la recherche de sa dulcinée, il n'imaginait pas une seule seconde la trouver elle. Son coeur s'emballant, il secoue la tête. Sa gorge nouée retient chacun des mots qu'il aimerait prononcer. Elle aussi, elle va sûrement lui en vouloir. D'être parti. De l'avoir abandonnée. De les avoir tous abandonnés. Incapable de prononcer le moindre mot, il est rassuré pourtant de voir ses traits rester très doux. Peut-être est-elle trop faible pour être en colère. Sous son invitation muette, il s'approche alors, refermant la porte derrière-lui. Ses mots l'inondent d'un bonheur sans nom. Il s'assoit doucement sur le bord du lit, ses yeux verdoyants plantés dans les siens. « Je.. Je suis désolé.. Tu m'as manqué aussi, tu sais. » lui avoue-t-il avec sincérité. Il attrape alors doucement sa main et la serre délicatement dans la sienne. « J-Je cherche Candace. » murmure-t-il d'une voix bancale et incertaine. Il soupire doucement, haussant les épaules, et laisse un sourire tendre s'afficher sur ses lèvres. « Mais je suis ravi d'être entré dans cette chambre.. Comment t-tu vas..? »

Peur, oui. C'est exactement ça. Il a peur. De dedans, de l'intérieur. il a beau le cacher, ça commence à se voir, mais il a de plus en plus de mal à camoufler ce qu'il ressent de plus profond. Et oui, il a peur. Peur de ne pas être à la hauteur, surtout. Peur de la décevoir. De tous les décevoir. Mais à cet instant, il tente de ne pas penser à tout ça. Après-tout, il est là, avec Sahara. « Je suis sûre qu'elle va bien, si ça peut te rassurer, je ne l'ai pas vue ici. Comment tu vas, toi ? » Il ne sait pas vraiment s'il doit être rassuré ou pas. Il espère juste qu'elle va bien, où qu'elle soit. Il pense un instant à ignorer sa question, mais finalement, déclare avec un sourire maladroit : « Ça va, moi... » Puis, histoire de ne pas avoir à approfondir plus encore, il se penche doucement vers elle et dépose ses lèvres sur son front. Sa relation avec Sahara ne ressemble communément à aucune autre vécue par le jeune Callaghan. « On fait avec. J'imagine que ça passera... J'ai qu'une hâte, retrouver ma vie. Et puis, si je suis là... C'est grâce à ta jumelle. Je lui dois beaucoup tu sais ? » Il considère un instant les bandages et autres indices de ses blessures et grimace, tant ça lui pince le coeur de la voir dans cet état là. De ne pas avoir été là. Il soupire doucement, détournant le regard. Ses yeux gris et pluvieux fixent un montant du lit. « Non, je ne le sais pas vraiment, je ne l'ai pas vue non plus depuis mon retour. Elles doivent me fuir. » Il hausse de nouveau les épaules, comme s'il s'en fichait, alors que les vibrations dans sa voix ne témoignent que du contraire. Il se mordille la lèvre, et serre un peu plus ses doigts, avant de lui sourire de nouveau, braquant son regard sur son beau visage, épuisé de l'épreuve endurée. Il n'imagine pas toutes les émotions qu'ils ont tous dû ressentir dans cette tragédie... Il décide d'éviter d'en parler. « Comment ça va, avec Isaac ? »

« Mais non, je suis certaine que personne ne te fuis. C'est juste qu'on a tous été beaucoup occupé après... la fusillade. Mais t'en fais pas pour ça, va. C'est ta jumelle, elle peut pas se passer de toi. » Il hausse les épaules, faussement désinvolte. Il n'y croit pas vraiment. Borné comme un mulet. Eleanor et Candace auraient de bonnes raisons de lui en vouloir, de le fuir. Ils en auraient, tous. Alors pourquoi pas Sahara ? Il la regarde, la considère, l'observe. Elle ne semble pas un seul instant remontée contre lui. Ça lui redonne un peu d'espoir. « On verra bien, au pire ! » fait-il avec un peu plus d'entrain. Et en prime, un sourire. Il décide alors de changer de sujet, histoire de ne pas se retrouver piégé. Il n'a pas envie de parler de tout ça, de toute façon. Et puis, ils peuvent parler « amour » ensemble, maintenant, non ? Maintenant que tout est clair entre eux. Qu'il n'y a plus cet ancien malaise. Et puis, il est curieux, aussi. « Pour le moment, tout va bien. Mais on dirait que chaque fois qu'on est réuni, quelque chose veut nous séparer... Il y a peu, j'ai appris pour Kôl et lui et je t'avoue l'avoir assez mal vécu. J'sais pas vraiment pourquoi il m'en a pas parlé et j'ai imaginé qu'il était encore amoureux d'elle... » Teddy reste silencieux de longues secondes. Peut-être une bonne minute, pensif, cherchant ses mots. Il serre un peu plus les doigts de la jolie brune entre les siens. « Tu sais, Sahara, il est vraiment amoureux de toi. » confie-t-il doucement, les yeux plongés au fond des siens. « Il avait mal réagi quand il avait appris que j'avais failli coucher avec Kôl, mais c'était encore pire quand il a su pour toi et moi. Il tient à toi bien plus qu'à elle. Parce qu'elle, c'est du passé. Toi, tu es son présent, c'est ça la différence. » Enfin, bon, il ne réalise pas vraiment que l'histoire de Kôl & lui, à la limite, Sahara pouvait l'ignorer. Il se mordille doucement la lèvre avec un espèce de sourire en biais. « Et puis, tu es bien mieux qu'elle. » avoue-t-il avec de la sincérité au fond des yeux.

La rassurer. Voilà le seul but de Charles. Il ne lui ment pas, jamais. Charles ne ment pas à ceux qu'il aime. Et Dieu sait comme il l'a aimée. Ça semble la réconforter, ou peut-être pas, lui qu'est-ce qu'il en sait ? Il l'espère. Espère qu'il n'est pas trop inutile. Qu'il sert au moins à quelque chose, à quelqu'un, que son retour n'est pas totalement vain. « Je doute pas de sa sincérité mais Isaac c'est pas le genre de gars à exposer ses sentiments... Contrairement à moi. » Charles a un petit sourire, et ne peut pas s'empêcher d'ajouter un « T'étais pas très expressive avec moi, pourtant... » discret et presque inaudible, accompagné d'un sourire taquin. Après-tout, il se souvient. Les sentiments cachés, la comédie, la rupture de tout ça. Heureusement qu'ils s'étaient réconciliés. Teddy s'était aperçu – trop tard – qu'il ne pouvait pas vraiment se passer d'elle. Elle pose sa tête sur son épaule, visiblement plus apaisée et il sourit, tordant un peu le bras pour réussir à caresser ses cheveux soyeux. Finalement, il passe son bras par-dessus son épaule. « Et avec Candace ? Tu comptes faire quoi, tu as déjà pris ta décision ? » Il se crispe légèrement, se mordillant l'intérieur de la lèvre. Ma décision..? Il met un temps à répondre. Il cherche ses mots, mais finalement, il n'y a pas trente-six adjectifs pour décrire ce qu'il est : un lâche. « J-Je sais pas.. Je ne l'ai pas encore vue depuis que je suis rentré, comme je te l'ai dis.. Mais j'ai pas entendu parler d'avortement, donc elle doit avoir décidé de le garder, je pense. Le choix ne m'appartient plus trop, j'ai fui à cause de ça parce que c'était trop dur d'affronter la réalité.. J'la mérite pas, et puis j'ferai un père affreux. Mais j'vais pas l'abandonner. » conclut-il, avec un soupir, le regard fuyant, honteux. Oh oui, qu'il a honte, Charles. La honte, vipère vicieuse qui court là sur son échine, jusqu'à sa gorge, et qui l'étouffe, lentement. Pour mieux le savourer. Il caresse de nouveau les cheveux de la brunette, avant de se pencher pour l'embrasser sur le front. « Tu m'as vraiment manqué. »

« Certes, mais nous n'étions pas en couple... Ici, c'est différent. Je t'assure parfois j'ose même pas lui dire ce que je ressens de peur d'être déçue de sa réponse. » Il l'écoute avec un petit sourire amusé au coin des lèvres. Il prend le temps de réfléchir, de peser ses mots. Il ne veut pas lui faire de peine. « Ma puce, on est tous comme ça. C'est pas qu'on aime pas, c'est juste par une espèce de pudeur débile. J't'ai jamais dis que je t'aimais quand c'était le cas. J'ai jamais dis à Candace alors que c'est le cas depuis longtemps déjà. C'est pas que les sentiments sont pas là, pourtant. C'est juste que.. dans les gènes masculins, c'est difficile, alors que vous, vous êtes plus enclines à dévoiler ce que contient votre coeur. » lui explique-t-il doucement, avec des exemples concrets, caressant doucement sa main, comme pour la rassurer. Puis le sujet dérive. Candace, le bébé, la fuite. L'échec cuisant qu'il a déjà l'impression d'essuyer alors que la partie n'a pas encore commencé. « Retire-toi cette idée de la tête. Tu ne seras pas un mauvais père, au contraire. Si vous le gardez, tu verras, une fois que tu auras sa petite bouille devant toi tu ne douteras plus. » Il pose ses yeux verdoyants sur elle. Il sait qu'elle est sincère, et ses mots l'apaisent un peu. Mais vous connaissez Teddy comme moi. Plus têtu qu'une mule, surtout sur sa propre image. « Non, Sahara, c'est pas une question de volonté, je sais que je l'aimerai, ce gosse, quand je l'aurai devant moi pour la première fois ! Que j'serai prêt à me jeter sous les balles pour lui. Mais j'ai pas eu d'exemple. J'sais pas comment on fait, moi. Mon père a crevé dans un crash d'avion, et ma mère, incapable d'affronter et de se rendre compte qu'on était encore là, Lea et moi, s'est pendue au bout d'une corde. C'est quoi l'exemple, là ? On m'a appris qu'à être lâche. Qu'à fuir. » Des choses qu'il n'a encore jamais dévoilé. Sa gorge nouée, les yeux embués, il détourne les yeux. « Tu ne seras pas seul pour affronter ça. S'il faut que je t'apprenne à changer les couches je le ferai. Promis, je serai là. » Il a un sourire tendre. Très tendre. Et la remercie d'un sourire, incapable de parler, ému. « Toi aussi tu m'as terriblement manqué Teddy. » Nouveau sourire. Pour éviter de trop s'attarder sur les sujets sentimentaux, ceux qui font mal au fond et bien en surface, il regarde les machines autour d'elle. « Qu'on dit les médecins ? Tu sors bientôt..? »