Il s'en va, les menottes aux mains. J'échange un long regard avec lui. Cet homme. Ce meurtrier. Mon père. Direction la prison. Double assassinat, crime passionnel, le tableau idéal. Demain, ça paraîtra dans le journal. Super. La gorge nouée, attendrie de voir ce que je considère comme un modèle s'en aller sous la pression des forces de l'ordre, mes yeux bleus chutent sur la silhouette recroquevillée, dans un coin. Zoé. Je me précipite vers elle, bloquée par un homme. Costume sombre, il vient déjà pour l'enterrement, qui c'est ce navet ? Mon regard se fait méchant. « Viens avec nous, mon enfant, ta soeur a été trop choquée, il faut lui laisser un peu de temps. » Mon enfant ? Pour qui il se prend ? J'suis plus une gamine ! Je fronce les sourcils. Derrière, je vois Zoé me tendre les bras. Sans un mot, je me faufile entre ses jambes et lui donne un bon coup dans les parties en passant. Au moins, il me rattrapera pas de suite. Je me précipite vers elle et la prends dans mes bras, tentant d'apaiser ses sanglots, serrant contre moi son corps qui se soulèvent par petits séismes réguliers. Je lui murmure des paroles idiotes. Comme « c'est rien » ou « ça va aller » mais non, ça n'va pas aller, voyons ! Ce type, c'est mon père. L'amant de notre mère. Qui a tué, donc, la mère de Zoé – et la mienne au passage, si vous suivez – et son père. Comment voulez-vous que ça aille ? Non, ça n'allait déjà pas, c'pas maintenant que ça va commencer. Zoé, elle a deux ans de plus que moi, et pourtant, j'me suis toujours sentie plus « forte ». Dans le sens physique, oui. Et moral aussi, peut-être. Alors, je me fais le voeu de la protéger. De ne jamais l'abandonner. D'être la carapace qui l'isolera de la misère de ce monde ingrat. Malheureusement, si mon père est parti en prison à vie aujourd'hui, je suis loin d'imaginer que je vais suivre ses traces dans quelques années.
« C'était de la légitime défense. » Le procureur me dévisage. Je n'ai visiblement pas la parole. Je n'ai jamais eu la parole. On ne me l'a jamais laissée, alors c'est pas dans un foutu tribunal que j'vais l'avoir. Surtout pas quand je suis assise sur le banc des coupables. Mon avocat me lance un regard m'intimant sans doute de me taire. « Ce que veut dire ma cliente, c'est que les évènements l'ont prise de court. Il n'y avait aucune préméditation à son geste. Elle est jeune, vous savez... » Quelle blague. L'âge comme excuse ? Et puis quoi encore ? Ouais, j'ai dix-sept ans, et alors ? Je serre les poings. Fixe le juge. Moment de suspense. Combien de personnes ont connu ce moment-là ? Ces secondes suspendues dans le temps où tout votre avenir se joue ? Suspendue à ses lèvres comme jamais je n'ai été suspendue aux lèvres de quelqu'un. Il a ma vie entre ses mains, ce petit con. Avec sa cape noire tout droit sorti d'un costume de Mangemort. Avec ses petits yeux encastrés dans un visage trop gras d'avoir toujours trop bien mangé. On n'se ressemble en rien, lui et moi. Il a eu tout ce que je n'ai jamais eu, pourtant j'suis sûre qu'il n'a jamais vécu comme je l'ai fait. Sous l'adrénaline, dans la fuite, là en courant, toujours, sans jamais s'arrêter. Non, on n'a rien à partager, ce sale juge et moi. On est relié pourtant pas une seule chose : il tient les fils de ma vie entre ses doigts crispés. Il ouvre la bouche. Il va me libérer, je l'ai vu dans ses yeux. Enfin, je crois. « Vous êtes condamnée à cinq ans de prison ferme pour homicide involontaire. »
« Ça non plus, tu l'avais pas fait exprès ? Tu l'as massacrée, cette pauvre gardienne, mais t'as pas voulu, c'est ça ? » La gifle est si violente qu'elle me retourne la tête. Je ne me débats même pas. J'ai mérité ma punition. Non, j'voulais pas. Mais ça ne sert à rien de lui répondre, il ne m'écouterait pas. Trois ans, bordel. Trois longues années à pourrir dans une cellule grise et suintante. Alors non, je l'ai plus supportée. Toujours à m'humilier, cette matonne. Toujours à me chercher des poux. Alors je lui en est collée une, mais je pouvais pas prévoir que je lui briserai un bras, trois côtes, et le nez. Elle est salement amochée. Enfin, j'crois. On m'a transférée. Dans une taule plus dure, soit disant, mais elles sont toutes pareilles. Il m'en colle une nouvelle et je serre les dents. Ne jamais me plaindre. Ne jamais m'abaisser à ça. Lui, c'est Lewis. Le gardien le plus gradé ici. Qui venge un peu sa collègue. J'suis sûre que ses mains sont douces. P't'être que j'aimerai voir leur effet sur mes joues sans que ça soit pour me frapper ainsi.
« Qu'est-ce qu'il t'arrive, encore ? On t'entend hurler dans tout le couloir ! » Impossible de lui répondre. Je sens mes muscles fondre. Et me faire atrocement mal. « Oh merde... En plus t'es une camée, c'est pas possible, bordel ! T'es en manque, c'est ça ? » Mon regard accroche le sien, avec un désespoir poignant. « Ecoute, j'peux te proposer un marché. » À ce moment-là, j'me dis que j'peux tout accepter pour ma dose. Vraiment tout..? Pourtant, quand il se dirige vers le lit de fortune de ma cellule, s'y allonge, et me regarde avec dans les yeux, cette flamme malsaine de ce que – je crois – on appelle le désir, je sens mes poils se hérisser sur mes bras. Je déglutis. Soudain, je ne suis plus aussi sûre que c'est la bonne solution. Mais mes muscles ressemblent à du coton. Du coton en train de s'embraser dans un incendie qui se propage dans le reste de mon corps avec un appétit douloureux. Si la dose que me fournira illégalement Lewis l'apaisera, je peux sans doute faire un effort et apaiser son appétit à lui, non ? Sauf que ça, j'l'ai jamais fait. Super, la première fois, non ? Dans l'obscurité d'une cellule, à moitié dévorée par le manque, avec un gardien qui me prostituera après ça régulièrement, en échanges de quelques petits avantages.
J'entends la grille s'ouvrir. Vous savez, cette grille, elle fait un bruit insupportable. Un vieux grincement, et les clés qui tintent contre le métal. Je fixe la maigre petite fenêtre cernée de barreaux. Il fait nuit noire. Je sais que c'est lui. Il vient, tous les lundis. C'est notre marché. Il m'emmène deux paquets de clopes. Et quelques doses pour me faire tenir la semaine. Nous couchons ensemble, et la semaine se poursuit. Au moins, j'peux survivre. C'est triste à dire, mais je crois que je l'ai accepté. J'me suis résignée. « Salut, Driz'.. » murmure-t-il doucement. Il a une voix grave, une voix qui pousse à la confiance. À l'abandon. Je ne tourne même pas la tête vers lui. Le sens juste approcher. Il s'assoit à côté de moi. Ça fait maintenant trois mois que ça dure déjà, ce petit chantage ingrat. Je le déteste, Lewis, vous savez. Enfin, j'pensais le détester, en tout cas. Il remarque les larmes sur mes joues. Je songe à ma vie déjà partie en fumée alors que j'ai à peine vingt ans. Il essuie mes joues d'un revers de main. Dieu que sa main est douce, moi qui ne l'avait connue jusque là que pour me foutre une correction lorsque je faisais des conneries. « On n'est pas obligés, si tu veux.. » Je tourne la tête vers lui. Le transperce de mes yeux bleus. « J'ai besoin de mes clopes et de ma dose. » Il me désigne le sac laissé à l'entrée de ma cellule. « Tout est là. » Il se lève. M'échappe. Si au départ, sa présence me donnait envie de vomir à cause du dégoût de notre relation, à présent, il me semble que si j'ai besoin d'héroïne, j'ai aussi besoin de lui. Mais ça, ça m'tuerait de le lui avouer. Je me lève à mon tour et le retient. « Non, reste ! » Un « s'il te plait » m'écorcherait les lèvres. Il me regarde. Ses yeux se rivent sur les contusions sur mes bras. Sur mon cou. Il sait que je me bats souvent avec les autres détenues. Il sait aussi que c'est toujours moi qui gagne. Mais également qu'elles se mettent souvent à plusieurs, et que je n'en ressors jamais indemne. Il attrape ma main. M'emmène sur le lit, dur et froid comme un rocher. Il m'y fait m'y asseoir, se relève, va dans l'étroit conduit qui me sert de salle de bain – cordialement composée d'un simple lavabo crasseux et de toilettes bancales – et y prend une éponge. Il revient, désinfectant mes plaies, pensant mes hématomes. Il ne dit plus un mot, moi non plus. Je le laisse faire. Ses mains s'attardent sur mon visage ensuite. Il lâche l'éponge. Caresse mes joues, y effaçant les dernières traces de mes sanglots. J'ai l'impression que son regard me pénètre, qu'il lit littéralement en moi. Qu'il sait que derrière la sauvage brute se cache en fait une enfant très faible. Ses doigts tracent le contour de ma mâchoire. S'attardent sur mes lèvres. Et soudain, il se penche. Me dérobe un baiser. C'est bref, furtif. Intense. Il ne m'a jamais embrassée. Il n'y a jamais eu de tendresse entre nous. Pourtant ce soir-là, le marché n'existe plus. Pour la première fois, nous « faisons l'amour ».
On ne se l'est jamais dis. Hors de question. Pour moi, c'était m'abaisser à trop bas. S'amouracher de mon gêolier, non mais et puis quoi encore ! Et pour lui, c'était une entorse au règlement, qui lui vaudrait sûrement une mutation. On a continué de se voir. En cachette. Il revenait plusieurs fois dans la semaine, et je me raccrochais à ses visites. Il est rapidement devenu comme une nouvelle drogue pour moi. Le temps a défilé. Trois mois, six, neuf, un an. Et puis, sans que je ne sache comment, ça s'est su. Et ça s'est propagé. Des photos avaient été prises. De nous. De nous étroitement mêlés. Quand il est venu me dire qu'il était muté dans une autre prison, je l'ai frappé. Très fort. Mes poings sonnaient creux contre son torse. Il s'est laissé faire. Je le détestais de m'abandonner. Je me détestais d'être complètement folle de lui. Puis je me suis calmée. J'ai même songé à lui avouer tout ce que je ressentais. Il a caressé ma joue une dernière fois, et s'est penché pour m'embrasser. Ses lèvres n'ont pas eu le temps de toucher les miennes que les grilles ont résonné dans le silence. On venait le chercher. Par pudeur, devant les autres gardiens, je n'ai rien dis de ce que je voulais lui dire. Lui non plus. Nous nous sommes quittés avec un long regard transpirant d'amour, de peur, de colère. Je ne l'ai plus jamais revu.
« Vous êtes libre. » Cinq putain d'années que j'attendais cette phrase. Cinq ans à croupir, loin du monde, loin d'une vie que j'allais reprendre inachevée, là où je l'avais laissée, il y a mille huit cent vingt-cinq jours. Une vie dont j'ai tout oublié. Moi, je ne me souviens plus que de la cellule sale, du cliquètement des clés contre le métal, des corrections infligées si on a le malheur d'être une détenue insolente, de l'entrave des menottes sur mes poignets, et de la plaie béante qu'a laissé l'absence de Lewis dans mon coeur. Impossible de le retrouver. Je ne savais rien de lui. Ni son nom de famille, ni l'endroit où il avait été envoyé, ni rien de sa vie. Peut-être avait-il une femme et deux gosses. Peut-être était-il parti à l'autre bout de la terre. Peut-être m'avait-il déjà oubliée. Alors, vous imaginez, vous ? Tomber de nouveau dans cette vie là. Vingt-deux ans. Sans rien savoir de ce qu'on y fait. La dernière fois que je me suis retrouvée dehors, j'en avais dix-sept. Enfermée comme un animal, j'ai l'impression d'avoir régressé. D'avoir sauté cinq ans en arrière. Jersey. Plus vraiment de famille, plus vraiment de connaissance. Qui garde contact avec une détenue ? Quel ami reste le vôtre quand il apprend que vous êtes enfermée pour un meurtre – même involontaire ? Personne. D'ailleurs, c'est justement ça : personne. Une chance de tout pouvoir recommencer, sûrement. L'avantage, c'est que je n'avais plus rien à perdre.
Spoiler:
PSEUDO : northern lights. PRÉNOM : manon. ÂGE : dix-neuf. OÙ AS-TU CONNU LE FORUM ?TON AVIS :FRÉQUENCE DE CONNEXION : autant que possible. DOUBLE COMPTE? le p'tit callaghan. PERSO INVENTÉ OU SCÉNARIO? inventé, voyons. ACCEPTES-TU QUE GAÏA (PNJ) INTERVIENNE DANS TES SUJETS? of course. CODE DU RÈGLEMENT : tss. AUTRES :
Dernière édition par T. Drizzle Montaigne le Sam 26 Oct - 9:09, édité 4 fois
Invité
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 9:47
Autant dire que j'adore ton choix d'avatar et que ton pseudo il gère la fougère bref, (re)bienvenue sister
Et puis pour les opposés c'parfait hein blonde yeux blonds -> brunes yeux marrons hihi j'adore
Charles-T. Callaghan
× MESSAGES : 3446 × INSCRIPTION LE : 31/01/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 10:53
merci darling. contente si tout te plait. j'avoue, j'avoue, c'est parfait. merciii. « blonde yeux blonds » jamais vu ce type de phénomène encore, des yeux blonds.
Invité
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 11:27
REEEEEEEE Ton pseudo il gère la fougère
E-L. "Sahara" Harrington
× MESSAGES : 2723 × INSCRIPTION LE : 31/01/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 12:01
c'est le genre de truc qui m'arrive tout le temps, je pense un truc et je note autre chose haha. Yeux bleus forcément
Invité
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 12:34
bienvenue
Sawyer N. Bringstone
× MESSAGES : 1692 × INSCRIPTION LE : 07/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 13:45
ooooh t'as pris Elsa pour finir elle te va si bien et l'avatar OMG le pseudo j'en parle même pas t'as toujours des pseudos stylés j'aime le début de l'histoire j'ai les larmes aux yeux j'ai toujours aimé ta plume et j'ai hâte de voir la suite sinon bienvenue parmi nous ma Manon d'amour looove
Invité
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 16:52
tamara + MERCIII. sahara + oui je vois ça. oui j'avais bien deviné t'en fais pas. valentina + mercii. saw + oui j'ai craqué pour elsa au final. elle est ravissante oui. t'oublie pas de me garder un super lien avec saw hein. merci pour le pseudo ma chérie. oooowh, t'es un amour. merci, j'écris vite la suite promis. merciii
Sawyer N. Bringstone
× MESSAGES : 1692 × INSCRIPTION LE : 07/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 17:08
tu as bien fait de prendre Elsa promis pour le lien, j'ai déjà une petite idée avec l'histoire que j'ai pu lire de rien
E-L. "Sahara" Harrington
× MESSAGES : 2723 × INSCRIPTION LE : 31/01/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 18:01
Mooooooooh la partie sur Zoé
Isaac-Callum Wheeler
× MESSAGES : 1381 × INSCRIPTION LE : 09/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 23:40
elle est belle Re excellent choix
Nolàn L-E García
× MESSAGES : 1943 × INSCRIPTION LE : 07/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Jeu 24 Oct - 23:44
Ta célébrité est super belle Très bon choix en tout cas. Re Bienvenuuuuuuuuuuuue parmi nous, ma chériiiiiiiie. + Super le pseudo + Titre.
Jaliyah-Sky H. Sanchez
× MESSAGES : 1718 × INSCRIPTION LE : 10/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Ven 25 Oct - 12:10
mais c'quoi votre blème de changer toujours de perso vous voulez que je perde la boule ? REEEE CHEF ! j'adore ta nouvelle bouille !
Anaëe C. Levinson
× MESSAGES : 340 × INSCRIPTION LE : 07/03/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Ven 25 Oct - 16:01
Vous me tapez pas si je dis que je connais pas la jolie fille sur l'avatar hein? Mais ton pseudo il gère la fougère bienvenue
Invité
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Ven 25 Oct - 23:12
saw + DIS-MOI TOUT. sahara + contente si ça te plait. zacounet (a) + merciii et j'veux un lien aussi tordu que celui qu'on avait avec Nevaeh, j'veux mettre un peu le vrac. nolàn + merciiiii ma chérie pour tous ces compliments. merci beaucouuup. jal + beeeeh, ça fait deux mois que j'ai plus touché à la petite neva', limite c'est pas un changement. j'avais besoin de nouveau. et puis, charles existe toujours, j'te rappelle. merci ma jali. anaëe + elle n'est pas connue, c'pour ça. c'est dommage d'ailleurs. merci beaucoup pour le pseudo. j'suis contente qu'il vous plaise. merci
E-L. "Sahara" Harrington
× MESSAGES : 2723 × INSCRIPTION LE : 31/01/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Sam 26 Oct - 10:16
tout est parfait ma chérie c'est trop triste mais parfait
mais t'es pas validée non j'déconne, t'es validée bien sûr
Charles-T. Callaghan
× MESSAGES : 3446 × INSCRIPTION LE : 31/01/2013
Sujet: Re: le chant des sirènes. † drizzle. Sam 26 Oct - 11:07