you've gotta get up and try, try, try.
Elle ne sait pas bien ce qu'elle va y faire. Ben ouais, ce rendez-vous est un peu étrange. Elle aurait pu s'inquiéter, mais pas du tout. En fait, elle a peur que l'infirmière lui dise qu'elle a décelé de grosses traces de drogues dans son sang, qu'il faut qu'elle aille en désintox, ou quelque chose dans le genre. Sa santé ? Elle s'en fout. Elle pourrait bien crever aujourd'hui que ça ne changerait pas grand chose. Elle la retrouve à l'heure convenue devant l'infirmerie. Mademoiselle Strauss ? J'suis Lily, l'infirmière qui s'est occupé de vous la dernière fois. Elle hoche simplement la tête. Pour lui dire qu'elle se souvient. Delilah oublie rarement un visage. Elle la suit à l'intérieur et s'assoit naturellement sur le siège. Elle se sent enfermée, là, dans cette pièce, dans ce bureau. Son côté claustrophobe qui refait un peu surface, sûrement. vous inquiétez pas, vous êtes en bonne santé et tout va bien. Elle ne répond rien et pose ses grands yeux bleus et nullement effrayés, plutôt curieux, sur la belle blonde qui lui sert donc d'infirmière. Rosie la trouve ravissante. Oui, vraiment belle. Elle se mord la lèvre. Rosie la devine gênée, mais elle ignore pourquoi. Toujours mutée dans son silence, elle attend, simplement. En fait.. je me posais surtout des questions par rapport à votre nom de famille.. Elle fronce les sourcils. Méfiante mais sans le montrer, Delilah s'accoude au bureau et hausse les épaules. Il est allemand, si c'est ça que vous vous demandez. Vous n'avez jamais d'étudiant étranger ? Elle sait bien que si. Que la plupart ne viennent pas de Jersey. En fait, elle a soudain peur. Et si c'étaient ses parents qui envoyaient cette femme pour retrouver sa trace ? Et si elle la ramenait là-bas, dans cet enfer vivant ? Un bref éclat de terreur traverse son regard bleu, avant de s'éteindre, aussi rapidement qu'il était apparu.

maybe this time.
 « Il est allemand, si c'est ça que vous vous demandez. Vous n'avez jamais d'étudiant étranger ? », elle a l'air étonnement à l'aise, j'avais l'impression dans ces yeux qu'elle était prête à un combat sans que ce dernier soit annoncé. J'avais l'impression qu'elle pouvait partir hors de contrôle à tout moment, j'avais une impression étrange, mais je la voyais surtout comme possiblement quelqu'un de ma famille, une cousine, une tante, une nièce, et peut-être une sœur aussi. Je la regarde, et m’installe au fond du siège, tentant de lui lancer un sourire qui se veut rassurant. « mes questions ne sont pas en rapport avec l'origine de ce nom. », j'ai peut-être été plus froide que je le voulais, mais elle a l'air tellement instable, tellement prête à disjoncté dans la seconde. On aurait cru à une pointe d'insolence peut-être. Je soupire, finalement, si je ne met pas tout ce que je sais sur le tapis, j'avancerais pas, et pas de chance pour moi, je reprends dans vingts minutes, et c'est pas en tournant autour du pot que ça avancera. « J'ai..j'ai été adopté, bon je sais, c'est pas vos affaires, mais j'ai fais de longues recherches et.. et mes parents étaient des Strauss, en Allemagne. », je souris un peu, histoire que la pilule passe mieux. « Je suis née à Berlin et..ils devaient certainement y vivre.. ou dans les alentours, j'sais pas je.. », je réfléchis à des indices qui pourraient faire en sorte qu'elle me donne un semblant de réponse, je cherche, je pense à la moindre chose qui pourrait lui faire penser à quelque chose de ses parents, peut-être nos parents. « C'était.. Marilyn et Ulrich Strauss. » Puis j'observe. J'observe ces yeux, ces traits, ces réactions. J'observe ces mains, et la moindre chose qui puisse me faire penser que j'pourrais enfin avoir une réponse. Je la regarde, je vois ces yeux et je me dis que c'est possible, je m'invente des choses, et je me vois déjà dans sa famille, je me vois avec elle à Noël, à Pâques, au nouvel an.. je nous vois heureux dans une famille, je me vois avec des gens qui veulent enfin de moi.. je me fais du mal.

scars and stories.
Delilah est détendue, oui. Elle ne montre qu'une façade, elle utilise cette attitude un peu froide et désinvolte, à la limite de l'insolence, pour se protéger. Mes questions ne sont pas en rapport avec l'origine de ce nom. Première nouvelle. Bon, et ensuite ? De marbre, Madison attend. Elle reste là sans bouger, se contentant de la fixer simplement avant de laisser ses yeux bleutés dériver dans la salle pour en observer la décoration, feignant que ça soit plus intéressant. Elle ne sait pas ce que cette infirmière lui veut, mais soudain... ça l'intrigue. Ou ça l'inquiète. Ou les deux. J'ai..j'ai été adopté, bon je sais, c'est pas vos affaires, mais j'ai fais de longues recherches et.. et mes parents étaient des Strauss, en Allemagne. En effet, ce ne sont pas ses affaires et pour ne pas vous mentir, Delilah s'en fiche. Au fil des ans, elle a apprit à n'écouter que d'une oreille distraite les malheurs des autres, pour ne pas les absorber. Elle a déjà suffisamment de mal avec les siens. Elle ne voit pas en quoi ça la concerne. Des Strauss, en Allemagne, ça court le pays. Je suis née à Berlin et..ils devaient certainement y vivre.. ou dans les alentours, j'sais pas je.. La petite blonde tourne la tête vers l'infirmière, interpellée. Berlin. Ville maudite. Elle garde le silence. À Berlin aussi, il y a des Strauss, non ? Autre que sa famille. Et puis, ça ne peut pas la concerner. Elle n'a ni oncle ni cousins pouvant avoir eu un enfant. Elle semble sans réaction. Semble, seulement. Elle s'est construit son petit monde, voyez-vous. C'était.. Marilyn et Ulrich Strauss. Petit monde qui d'une seule phrase, s'effondre soudainement.

Flashback.
Elle a à peine onze ans. Ils viennent de se disputer pour des broutilles. Et elle est là, au milieu. Dès qu'elle s'approche, son père la pousse. Il jure contre elle, contre cette gamine qui est toujours là dans leurs pattes et dont ils ne savent – à l'époque pas encore – pas quoi faire. « C'est l'autre qu'on aurait dû garder ! J'suis sûre qu'elle aurait été moins con ! Et plus docile ! » Sa mère lance un "chuuuut" bruyant mais son paternel balaie l'air de la main, rageux. « Je m'en fiche qu'elle sache qu'elle avait une soeur ! C'est cette imbécile là qu'on aurait dû donner à l'adoption et garder l'autre, qui serait donc déjà plus vieille et qui servirait déjà plus. »
Fin du flashback.

Elle s'est levée, sans s'en rendre compte, mais elle se tient dos à la porte, appuyée contre celle-ci, son regard bleu effrayé. Celui d'une biche en chasse. Traquée. Elle est sûrement envoyée par eux. Peut-être ment-elle, peut-être est-elle là pour la leur ramener. Elle imagine tout est n'importe quoi. Il ne faut pas un bac plus huit pour voir qu'elle est apeurée. Réellement apeurée. Que.. que me voulez-vous ? Elle n'arrive pas à croire qu'il s'agit peut-être là de sa soeur. C'est impossible, non ? Pourtant, malgré son cerveau embrouillé, elle parvient rapidement à se dire qu'elle est plus jeune que l'infirmière. Et que donc, techniquement, ... c'est possible.

maybe not.
Je me dis pourquoi pas. Je me demande si c'est elle, et je me met à penser à ça, bêtement. Si c'était elle ? Si elle avait les yeux de mon père, et la bouche de ma mère ? Si elle était ma sœur ? Ma cousine ? Si nos yeux et nos cheveux ne mentaient pas ? Si c'était vrai tout ça ? Après tout, pourquoi pas. Elle se lève et je fronce les sourcils. J'avais un peu peur, j'avais peur de trouver une réponse. J'avais chercher tant de temps pour ça. Commencer des recherches à seize ans, et ne pas s'arrêter. Toujours aller plus loin, creuser plus profond, encore et encore, tomber sur des faux documents et puis recommencer. Reprendre du début, et être certaine que c'est la bonne voie alors que tout le monde hurle que non. Continuer, aller encore un peu plus profond, chercher, au fin fond du pays, au fin fond du monde. Découvrir que finalement ils ne sont pas si loin. Se dire qu'ils pourraient être mes voisins, les parents d'une amie, me dire que c'est eux, qui font leur course là bas, ou eux qui sortent leur chien, ou bien eu x qui passent à la télé. M'inventer des parents, et me demander « pourquoi pas ? ». J'essayais juste de trouver ma place, juste d'être à la bonne place. J'avais toujours espérée trouver mes parents, et passer mes Noëls avec eux, juste pour pouvoir être là où je devais être. J'avais comme l'impression de ne pas être accomplie, de me chercher encore, et la confiance. Ouais, la confiance. Cette chose que j'ai eu que bien trop tard. Personne ne voulait de moi, alors forcément.. puis il y a eu Will. Et là maintenant il y a cette fille, elle, et peut-être des réponses. Pourquoi on m'a laissé ? J'étais peut-être pas assez belle ? Pas assez bien ? Mes cris et mes pleures n'étaient pas assez mélodieux ? Pourquoi ne pas garder un bébé ? J'étais trop grosse ? Trop maigre ? Quel problèmes aurais-je pu avoir pour qu'on ne veuille pas de moi ?
«  Que.. que me voulez-vous ? » Je la regarde, elle est paniquée, et je comprends pas trop. En fait, la seule chose que je comprends c'est que c'est elle. C'est une cousine, une sœur, une nièce.. j'en sais rien, mais elle est de la famille Strauss, elle est de ma famille. Une chaleur empli mon cœur, mais je la garde secrète, surtout face à sa réaction. Je reste assise, je ne veux pas l'affoler encore plus. Finalement, mes six mois en service psychiatrique auront pas été si inutiles que ça. « J'veux juste des réponses.. », je la regarde, les yeux pleins d'espoir, peut-être un peu trop. « dites moi si c'est de votre famille.. j'vous en prie j'cherche depuis déjà..bien trop longtemps.. », les larmes me montent, mes parents biologiques c'est un sujet sensibles, et je suis très à fleur de peau en ce moment.

it's the moment to live and the moment to die.
Tout s'est brisé. D'un seul coup. Ses solides barrières... effondrées. En quelques mots. Deux noms pour être précis. Elle en tremble presque. Elle a l'impression que ses jambes ne la soutiennent plus, pourtant elle tient toujours debout. Là, elle aurait besoin qu'on la prenne dans ses bras. Qu'on lui dise qu'elle ne craint rien. Qu'ils ne la retrouveront jamais. Mais vraisemblablement, ce n'est pas la réaction de l'infirmière, puisqu'elle reste loin, terriblement loin. Peut-être sent-elle son instabilité. Peut-être sent-elle comme elle pourrait la repousser également. J'veux juste des réponses.. Comme une enfant, elle voudrait se boucher les oreilles. Elle voudrait oublier tout ça. Va-t-elle devoir s'enfuir autre part ? N'est-elle donc pas plus en sécurité ici ? Elle a même changé de nom.. Elle essuie les larmes sur ses joues, elle se fiche de pleurer à ce moment-là. Quelques-unes de ses mèches viennent se coller sur son visage, elle les écarte, lassée. Elle ne sanglote même pas, les larmes qui roulent sur ses joues sont des larmes vieilles, anciennes, qui ne nécessitent aucun hoquet. La douleur est d'avant, mais elle fait toujours aussi mal. Dites moi si c'est de votre famille.. j'vous en prie j'cherche depuis déjà..bien trop longtemps.. Elle inspire à fond, essayant de se calmer, mais elle n'y arrive pas. Finalement, réaction plutôt animale – ce à quoi on l'a contrainte chez elle – elle se laisse tomber contre la porte, glissant jusqu'au sol où elle ramène ses jambes contre elle, les entourant de ses bras. C-Ces.. gens dont vous.. dont vous parlez, ce sont.. ce sont mes.. p-p.. mais comment dire ça ? Les mots se brisent, se refusent. Des parents. Des assassins, oui. Mes... p..a..rents. bredouille-t-elle, détournant le regard et se prenant la tête dans les mains. Qu'on l'enlève, tout de suite. Qu'on l'emmène, qu'ils lui arrachent le semblant de paix qu'il lui était accordée jusqu'ici sur cette île. Soudain, comme électrocutée, elle relève les yeux d'un coup vers elle, une lueur fugace dans ses yeux bleus. Il ne faut pas que vous leur dîtes que vous m'avez vues, il ne faut pas les appeler, ils ne doivent pas savoir où je suis ! Elle parle très vite, comme s'il s'agissait... d'une urgence.

but just because it's burn, doesn't mean you're gonna die.
Des réponses. À l'heure actuelle, c'est tout ce que j'attends. Je veux juste savoir si c'est vrai, si mes recherches sont bonnes, si elles ne sont pas faussés, si elles mènent quelque part, et si elles mènent pourquoi pas à cette jeune femme, alors encore en face de moi. Bizarrement, elle se met dans un état que je ne comprends pas. Finalement, peut-être que mon séjour en service psychiatrique aurait pu être plus long. Peut-être a-t-elle des problèmes ? À vrai dire, c'est une manière bizarre de réagir et je me dis que finalement, je n'aurais peut-être pas du. Si j'avais su... elle se glisse jusqu'au sol, et je me lève pour m'avancer. « C-Ces.. gens dont vous.. dont vous parlez, ce sont.. ce sont mes.. p-p.. », je m'avance doucement, néanmoins je reste à quelques pas, et je m'appuie sur le dossier de la chaise pour les patients, sur laquelle elle était assise il n'y a pas dix minutes. Je la regarde, ou plutôt non, je l'observe. « Mes... p..a..rents. », et je reste bloqué entre rire et larmes. Dois-je lui sauter dans les bras ? La prendre contre moi et lui dire que nous sommes sœurs ? Elle a certainement du le deviner. Je la regarde, là, devant moi, et je me demande bêtement pourquoi. Pourquoi me rejeter moi et garder elle ? Peut-être qu'elle est plus belle.. oui elle l'est assurément. Elle a un petit nez mignon, et des grands yeux plus clairs, ses lèvres fines et son visage est plus rond. Même maintenant, elle ressemble encore a une petite fille. Je me met à l'envier, et je me dis aussi qu'elle est la seule qui peut m'amener jusqu'à mes vrais parents. « Il ne faut pas que vous leur dîtes que vous m'avez vues, il ne faut pas les appeler, ils ne doivent pas savoir où je suis ! ». Je ne comprends que la moitié, j'entends tout, mais je ne comprendre pas. « Quoi ? », c'est tout ce que j'ai réussi à dire. Je me tiens à la chaise, je tente de réaliser doucement qu'en fasse de moi se tiens ma sœur. Que l'ont partage le même sang, et les mêmes gènes, et pleins d'autres trucs encore, peut-être même un début de maladie héréditaire dont aucune de nous ne soupçonne l’existence. « vous.. », je fronce les sourcils, m'approchant d'elle. « tu es ma sœur.. », une lueur éclaire mes yeux, peut-être jusque un peu de bonheur, de soulagement aussi. « parle moi d'eux.. j'veux savoir à quoi ils ressemblent, comment ils sont. J'veux savoir comment se passe vos Noëls et comment étaient tes anniversaires », je veux vivre une enfance à travers tes récits, je veux savoir ce que j'ai raté, je veux rattraper le temps. Je la regarde, et je cherche naïvement des traits en commun, j'aimerais qu'elle remarque quelque chose, le nez de papa, ou bien les lèvres de maman, je veux qu'elle me parle d'eux, je veux qu'elle me dise où ils sont, leur adresse et leur numéro. Je veux la connaître, et je veux savoir pourquoi elle.. soudain, sa phrase me percute. Peut-être qu'elle a fuguée, et elle ne veut pas qu'ils sachent ? « Delilah ? C'est ça ? », je crois ne pas me tromper, alors je continue. « tu..tu es partie de chez eux ? », et je m'attends au pire. Pas venant d'eux, non, venant d'elle. Je m'attends à des raisons comme par exemple le refus d'un copain, ou alors juste une crise d'adolescence. Si elle savait qu'à mes yeux, elle était celle qui a tout eu.

we've gotta get up, and try, try, try.
Elle n'arrive pas clairement à comprendre. À réaliser. Elle ignore si ce n'est pas plus sain de ne pas savoir tout ça, de ne pas déterrer tout ce qu'elle croyait avoir enfoui suffisamment profond. Mais apparemment, non. vous.. tu es ma sœur.. Delilah redresse la tête d'un seul coup. Sa soeur. Sa.. soeur, bon sang. Elle se mord la lèvre si fort qu'elle se met à saigner. Son coeur tambourine si vite que ça en est douloureux. Elle fuit le regard de l'infirmière. Une soeur. Tiens donc. Une soeur qui a sûrement tout eu. Pour elle en tout cas, ça n'a pas pu être pire que ce qu'ils lui ont fait vivre. Elle a sûrement eu une enfance normale. Ses premiers amours, des amitiés, une scolarité. Pas comme elle. Inconsciemment, elle se met à lui en vouloir très fort... avant de réaliser qu'elle n'y est pour rien, elle. Et qu'elle représente, aujourd'hui, le seul membre peut-être réel de sa famille. parle moi d'eux.. j'veux savoir à quoi ils ressemblent, comment ils sont. J'veux savoir comment se passe vos Noëls et comment étaient tes anniversaires. Maddie relève brusquement les yeux, une lueur fugace dans le regard. Ses traits se sont durcis et d'une main désinvolte, elle essuie son visage où quelques larmes ont roulé. Elle se lève, inspirant à fond. Il faut qu'elle se reprenne. Mais cette réaction est plus fort qu'elle. Elle a toujours cette impression d'être traquée, comme une proie. Comme lorsqu'ils envoyaient ce chien à ses trousses pour la retrouver lorsqu'elle s'enfuyait. Un chien, merde. Une biche, voilà ce qu'elle était pour eux. Une simple proie, considérée comme du bétail. Elle pose ses yeux bleus et involontairement froids sur l'infirmière, enfin, sur sa soeur. Elle s'approche de quelques pas, croisant son regard et ne le lâchant plus. Des monstres. C'est tout ce qu'ils ont été avec moi. Je n'ai jamais connu Noël. Ni même les anniversaires. Enfin, si, ces derniers étaient les pires jours de l'année car ils me forçaient à passer les soirées avec eux, ce qui était encore pire. Elle a envie de vomir. Elle détourne son regard, respirant fortement. Sa voix rauque témoigne de son incapacité à parler de ça à la légère. Delilah ? C'est ça ? tu..tu es partie de chez eux ? Delilah fait le tour du bureau, inspirant à fond et regardant à travers la fenêtre d'un air rêveur, répondant sans même se retourner. Si tu es ma soeur... je pense que tu peux savoir qu'en réalité, je m'appelle Madison. Et euh.. je pense que t'as le droit de tout savoir en détails, hmm.. on pourrait aller s'expliquer tout ça ailleurs, ce bureau m'étouffe.. Elle se tourne vers elle, s'approchant, remarquant qu'elle a les mêmes yeux bleus qu'elle, la même peau un peu translucide, les mêmes cheveux blonds comme les blés. Elle sent ses yeux s'embuer et soudainement, elle se jette dans ses bras, se serrant fort contre elle. A-t-elle enfin trouvé ? Quelqu'un de plus fort qu'elle, quelqu'un qui peut être là pour lui dire tout va s'arranger ?

you see it's not the wings that make the angel, just have to move the bats out of your head
Je la regarde et j’attends des réponses. Juste des réponses. Sur qui ils sont, sur comment ils sont. « Des monstres. C'est tout ce qu'ils ont été avec moi. Je n'ai jamais connu Noël. Ni même les anniversaires. Enfin, si, ces derniers étaient les pires jours de l'année car ils me forçaient à passer les soirées avec eux, ce qui était encore pire. » Je fronce les sourcils, pour dire vrai, je ne comprends à peine. Ce n’est pas possible. Les gens qu’elle décrit ne sont pas mes parents. Elle a inventé tout ça, par colère certainement. Ils ont du lui faire un sale coup, et elle se venge, ou que sais-je, mais je ne peux imaginer mes parents comme ça. Impossible. Ne pas connaître Noël, ne pas connaître les anniversaires, ce n’est pas possible, ce n’est pas humain. Je ne comprends que la moitié de ce qu’elle me raconte, en fait je me dis surtout que c’est un mensonge, mais qui d’autre croire ? Mes attentes ne sont peut-être pas la réalité. « Si tu es ma soeur... je pense que tu peux savoir qu'en réalité, je m'appelle Madison. Et euh.. je pense que t'as le droit de tout savoir en détails, hmm.. on pourrait aller s'expliquer tout ça ailleurs, ce bureau m'étouffe.. », je répète son prénom comme pour l’imprimer dans ma tête. Elle se tourne enfin vers moi, et elle s’approche. Encore et encore, et je réalise qu’elle n’a jamais été aussi proche de moi depuis que je sais que c’est ma sœur. Ma sœur. Ça me retourne encore de le savoir. Je ne peux m’empêcher de la regarder, de voir ses yeux, de remarquer leur ressemblance avec les miens, et ses cheveux, et puis son teint, et finalement je me dis que je rêve peut-être. Combien y avait-t-il de chance que ma sœur me tombe dessus comme ça ? Combien y avait-t-il de chance que mon passé vienne à moi ? Je cherchais depuis bien longtemps des réponses, et le puzzle que j’avais commencer à compléter se rempli avec elle, et il se remplira encore grâce à ses mots. Grâce à ses histoires sur nos parents, les anecdotes, les histoires drôles, et nos cousins germains qui étaient certainement amoureux d’elle. J’ai hâte d’entendre tout ça, et malgré qu’elle pense que ce sont des monstres, mon idée sur le fait que son jugement est trop dur est encore présent. Je hoche simplement la tête, « bien sur, pas de soucis.. il y a un café un peu plus bas sur la rue, on peut y aller si tu veux. », je lui souris, j’ai en face de moi ma sœur. La fille que mes parents ont préféré garder. Et d’un coup, elle me saute dans les bras. Je ne comprends pas la raison, mais j’ai le reflex -simple mais pourtant important- de la serrer dans mes bras. « hey.. », que dire d’autres ? Je ne sais pas la raison de son mal être, mais j’ai toujours rêver de ça, de ce moment. De connaître quelqu’un qui partage mon sang, et puis d’être là pour cette personne. Lui dire que tout ira bien, puisque maintenant nous sommes réunis. La famille est la seule chose qu’on ne peut briser, qu’elle soit de sang ou qu’elle soit de cœur. Je caresse lentement ses cheveux, et la garde précieusement contre moi. « sht..sht.. ça va.. je suis là.. », le rôle des infirmières ne comprends pas d’enlacement, on nous le répète encore et encore, et finalement ce côté un peu froid venant des infirmières avait lentement déteint sur moi, mais là c’était différent. Là, c’était ma sœur.

but just because it burns doesn't meant you gonna die.
Elle le voit. Elle est pas bête, la Delilah, ça fait longtemps qu'elle a cessé d'être naïve et dupe. Elle le voit bien, qu'elle ne la croit pas. Qu'elle doit passer pour la sale gosse en crise d'adolescence retardée. Rosie ne regarde pas les ressemblances. Elle ne veut pas qu'elle lui ressemble. Personne ne devrait lui ressembler. Tu es un monstre. Quiconque lui ressemble l'est aussi, et cette jeune femme semble bien trop bonne pour l'être. Trop belle, trop gentille, trop... parfaite. Tout ce qu'elle n'est pas elle, en somme. bien sur, pas de soucis.. il y a un café un peu plus bas sur la rue, on peut y aller si tu veux. Un café ? Bien sûr, elle sera un peu plus libre qu'ici. Mais en réalité... elle se vois mal raconter son histoire au milieu de tant d'inconnus. Bref, on verra ça plus tard, à la limite. Elle hoche simplement la tête, docile. Elle a reprit le contrôle d'elle-même. Elle a remis son armure en place. Avec ça, rien ni personne ne peut la toucher. Enfin, ça, c'est ce qu'elle se plait à raconter et à se faire croire à elle-même. Mais elle se jette dans les bras de sa grande soeur – dieu que ça fait étrange –, la serrant fort contre elle sans rien dire. hey.. Elle sent les mains de l'infirmière lui caresser les cheveux et elle frémit, consciente qu'au niveau familial, personne n'a jamais été doux comme ça avec elle. sht..sht.. ça va.. je suis là.. Elle finit par se détacher. Le souffle court et la gorge nouée, il n'est pas dur de s'apercevoir que la blondinette se retient d'exploser en sanglots. Mais elle n'est pas encore prête à se libérer en larmes de ce poids énorme qui brime son souffle depuis tant d'années. Depuis sa naissance. Ça serait bien trop d'un coup. Et elle ne peut pas, non. Elle n'y arriverait pas. Elle ne s'en relèverai pas. Elle inspire à fond et sans un mot, ouvre la porte et sort de la pièce. Elle respire un peu mieux. Tu viens ? demande-t-elle d'un air à présent tout à fait naturel. Elle sourit même un peu ou peut-être n'est-ce encore qu'une image du masque qu'elle entretient savamment pour faire penser d'elle qu'elle est plus qu'un immense champ de ruines.