Exceptionnellement, je m'étais rendue à l'université pour l'après-midi. Il était déjà seize heures, et je n'avais encore rien trouvé dans ces fichus bouquins. Oui, il fallait bien que je prépare mon cours du jeudi, quand je venais aider ces étudiants en droit en détresse.  Je consacrais une soirée par semaine à ces étudiants, et j'aimais beaucoup cela. Je n'avais pas mon diplôme depuis longtemps, mais je me sentais capable de venir en aide à ces jeunes gens. Le nez fourré dans un bouquin aussi gros que complexe, je ne fis pas attention aux personnes qui entraient dans la bibliothèque. Voyant que la pièce se remplit, je préfère m'éclipser de cet endroit, essayant de trouver réponse à mes questions. Je me retourne vivement, livre en mains, heurtant le premier venu. Je me précipite pour ramasser le livre énorme qui était tombé sur les pieds d'un jeune homme, me relevant rapidement pour m'excuser. Je remet mes cheveux en place, rivant enfin mon regard vers celui que j'avais bousculé. Absolem. Alors que les mots veulent sortir de ma bouche, aucun son ne sort. J'avais complètement oublié qu'il travaillait ici lui aussi. Je reprend le plus vite possible mes esprits, souriant niaisement. « Désolée j'ai pas fait exprès. Ça va ton pied ? » demandais-je, me mordillant la lèvre en évitant bien sûr son regard bleuté.

Dès qu'il ouvre la bouche, je ne peux m'empêcher de sourire. Il n'a vraiment pas changé ni mûri d'un poil. C'est toujours l'enfant que je connais, même s'il va sur ses vingt-sept ans maintenant. Je serre le livre contre ma poitrine, retrouvant peu à peu mon assurance. Devant Absolem, encore plus gêné que moi, ce n'est pas difficile. « Euh oui oui, ça va merci. » C'était comme si les centaines de rendez-vous qu'il avait annulé resurgissaient d'un coup. Comme si aujourd'hui était le jour pour rattraper tout ça. Ou peut-être que je me faisais tout simplement des idées, je suis assez forte pour m'imaginer n'importe quoi. Par exemple, j'ai toujours cru que le jeune homme était très occupé pour éviter mes appels ou mes sms. Bien entendu, j'étais idiote car je savais pertinemment qu'il n'avait pas envie d'avoir affaire avec moi. Seulement.. nous étions en face l'un de l'autre, figés, à discuter comme le font des étrangers. Je fais une nouvelle fois passer mes cheveux derrière mon oreille, telle une gamine amoureuse qui n'ose faire la discussion. « Tu venais faire quoi ici ? Tu interviens toujours de temps en temps sur le campus ? »