Le printemps arrive, c'est pourquoi les derniers jours étaient un peu plus doux qu'en temps normal, et que le soleil pointait plus volontiers le bout de son nez. J'avais enfilé une petite robe, avec un petit gilet et une paire de talons, pour aller sur Liberation Square, m'installer sur une terrasse de café où j'avais rendez-vous avec mon frère, Teddy. Ayant quelque chose a faire avant de me rejoindre, j'étais venue seule au café. Je m'étais posée sur la terrasse sans rien commander, attendant que Teddy arrive. Quelques minutes mon arrivée, alors que je profitais des quelques rayons de soleil qui réchauffaient ma peau un court instant, mon téléphone se mit a sonner. Teddy m'annonçait qu'il arrivait. L’apercevant au bout de la place, je fis un immense sourire et fit un signe au garçon pour qu'il nous serve deux bières bien fraîches. Une fois à ma hauteur, je me levais pour le prendre dans mes bras. Ca devait faire quoi... Quatre heures qu'on ne s'était pas vus, mais pourtant il m'avait beaucoup manqué. On avait beau s'envoyer des sms, ça ne changeait rien au fait que j'avais besoin de le voir. C'est ma moitié, c'est comme ça. Après une étreinte durant laquelle j'avais bien failli l'étouffer, je disais, en faisant de petits yeux tristes « Ca va, tu fais pas trop attendre ta pauvre soeur toi »

Je fis un petit sourire tendre à mon frère en le voyant prendre ce petit air, avant de répondre, en prenant sa tête dans mes mains « Tu pourrais avoir une heure de retard, je te pardonnerais sans hésitation ! », je lui fis un gros bisou sur la joue avant de m'asseoir. Je remerciais le serveur d'un signe de tête, trinquant ensuite avec Teddy. Je buvais une longue gorgée, avant de reposer mon verre. Je plissais un peu les yeux, la fraîcheur de la bière me faisant un peu mal à la gorge. Je jetais une mèche de cheveux en arrière, avant de répondre « Devines qui a tout déchiré au dernier examen de droit ?? », je me pointais du doigt en levant la tête « MOI ! C'était jouissif de voir le soi-disant intello de mon cours se décomposer quand j'ai montré ma feuille. ». J'étais, comme très souvent lorsque j'avais beaucoup de choses à lui dire, surexcitée, je parlais rapidement, faisant de nombreux gestes, parlant avec les mains, multipliant les expressions faciales... Une vraie gamine quoi. Bah oui, j'étais plus que contente de lui raconter tout ce qui arrivait de bien dans ma vie. Je jouais avec mon dessous de verre, le faisant glisser entre mes doigts, avant d'ajouter, un peu plus timidement cette fois-ci « Et Jules est venu me voir avant hier... On a pas mal... discuté on va dire... Et... Il m'a fait réaliser un tas de choses. ». Je me frottais un peu la tempe, légèrement gênée par ce que j'allais dire. Non pas parce que j'en parlais à Teddy, mais parce que je n'avais jamais eut l'occasion de lui dire ça à propos d'un garçon. D'une petite voix, je reprenais donc « Je suis amoureuse de lui. », je souriais timidement avant de boire pour me cacher un peu.

Je lui fis un grand sourire en guise de remerciement. Mon frère, c'est vraiment un amour. Il peut dire ou faire ce qu'il veut, je ne peux pas lui en vouloir, c'est mon double et il est tellement gentil qu'on ne peut pas lui faire la tête vous voyez. C'est le meilleur... Oh, comme moi ! Comme quoi, c'est bel et bien de famille. Je me sentais bizarre après avoir annoncé ça à Teddy. J'étais fière d'éprouver des sentiments nouveaux pour quelqu'un, surtout pour Jules. Depuis qu'il m'a ouvert les yeux, je me rends compte que j'étais amoureuse de lui depuis longtemps, mais que j'avais juste refusé de succomber à l'amour. Finalement, c'est plutôt plaisant. J'avais hâte de voir la réaction de Teddy, qui allait sans doute laisser apparaître une petite once de jalousie et d'inquiétude, ce qui est tout à fait normal, même si le jeune homme en question était notre meilleur ami Jules. En entendant cette question, je me pinçais les lèvres, sentant le rose monter à mes joues « Je pense. En tout cas, j'ai vraiment envie de me poser avec lui. ». Je soufflais un peu, comme soulagée, me faisant de l'air avec mes mains « Rah ça me fait tout drôle de dire ce genre de choses ! Qui aurait cru que moi, je dirais quelque chose comme ça un jour, sérieux ! ». Puis Teddy devint bizarre. Je ne m'attendais pas à ce genre de réaction plus négative que positive. J'arquais un sourcil, le dévisageant un court instant. Je le fixais, me penchant un peu pour attirer son regard qu'il avait détourné afin de le baisser. Quelque chose n'allait pas, je le savais, c'était flagrant. Cette nouvelle ne le rendait pas heureux, et le perturbait vraiment. Je pris un air grave « Charles ? Mais qu'est-ce-qu'il y a enfin ? ». Oui, je venais bel et bien de l'appeler Charles, et alors ?. Finalement, j'aurais préféré qu'il ne dise rien. Je secouais légèrement la tête « Hein ? Mais qu'est-ce-que tu racontes, pourquoi il aurait fait ça, franchement. ». Je décidais de ne pas m'attarder là-dessus, pensant vraiment qu'il n'était pas sérieux et qu'il disait cela car il était inquiet. Je posais ma main sur la sienne, un petit sourire aux lèvres « Hey, Teddy... C'est pas parce qu'il y a quelque chose entre Jules et moi, que tu vas passer au second plan, ou quoi que ce soit, tu le sais très bien, te mets pas dans cet état »

Je ne savais pas trop sur quel pied danser. J'avais envie de croire Teddy, car il ne me mentirait certainement pas. Mais d'un côté, vu l'amour que Jules me porte, je doute qu'il soit nécessaire que je me méfie... En gros, j'étais un peu perdue. Je haussais les épaules « ...C'était il y a une semaine, encore une fois, j'ai surement été ignoble avec lui, il a dû faire ça sans réfléchir, avec un coup dans le nez peut-être, ça lui ressemble pas. ». Je ne m'en faisais pas trop. Je décidais de passer l'éponge là-dessus pour le moment, j'en parlerais avec Jules en temps voulu de toute manière. Je gardais un air assez serein, sûre de moi pour le coup, cherchant a rassurer Teddy. Je demandais, saisissant mon verre « Mais, elle est au campus cette fille ? Si tu la croises, tu me le dis, je vais aller la démonter quand même histoire qu'elle se fasse pas des films, ça fait longtemps que j'ai pas cogné une pétasse. ». Je sais, on dirait pas comme ça, mais je suis assez bagarreuse. J'apprends a me contenir le plus possible pour ne pas péter un câble à la moindre provocation et ne pas éclater des nez pour un rien. Mais il est clair que si quelqu'un cherche mon frère, homme ou pas, je lui éclate la face, je ne crains pas les coups. Et en plus, possessive comme je suis, je n'autoriserais personne a toucher à Jules, je ne l'ai jamais fait, et ce n'est pas maintenant que je vais commencer. Alors, si je retrouve cette fille, elle va le payer... Je me vengerais de manière subtile, bien entendu... Je suis douée pour les coups bas. Je buvais une longue gorgée, en dévisageant un peu mon frère, qui avait l'air vraiment bouleversé. Mais bon, ça lui passera. Je passais ma main dans mes cheveux, tout en demandant, le sourire aux lèvres « Bon, et toi alors ? Qu'est-ce-que tu me racontes ? ». J'avais hâte qu'il me raconte sa journée, qu'il me parle de ses cours et... de ses amours. Bah oui, mon frère, c'est un Don Juan quoi ! Et comme on se dit tout, je savais que j'allais en avoir des histoires a entendre.

Je gardais un petit sourire, parce qu'en voyant mon frère, je ne pouvais rien faire d'autre. Puis en entendant le ton sur lequel Teddy venait de s'adresser à moi, et l'air qu'il prenait, ce sourire disparut immédiatement, laissant place à un sourcil arqué et une moue contrariée « Euh déjà, le prends pas comme ça, parce que sinon je m'en vais. ». J'étais restée correcte, et lui, s'excitait et me parlait ainsi ? Ca n'allait pas se passer comme ça. Surtout que j'étais particulièrement irritée par ce que je venais d'apprendre. Je répondais « Je ne me souviens pas avoir abordé ce sujet là avec lui, il n'a pas osé m'en parler je suppose ! ». J'étais assez surprise, je ne peux pas le nier, mais maintenant que j'ai ouvert les yeux, Jules et moi allions discuter de tout ça. J'attendais, buvant un peu, que Teddy réponde à ma question. Puis finalement, il répondit par une autre question, chose que je déteste. Je posais mon verre, le gardant en main, adorant sentir la fraîcheur de ma boisson entre celles-ci avant de réfléchir un court instant... Je répondais très honnêtement « Sur ta prof et toi ? Non, c'est pas moi. En revanche, quand je l'ai surprise en train de flirter avec un élève, j'en ai parlé a un ami qui craquait sur elle... Puis après, il l'a raconté et les rumeurs étaient lancées ! ». Je n'allais certainement pas lui cacher, je n'en avais rien a faire. A l'époque, j'avais raconté ça, car je n'étais pas encore au courant pour Teddy et elle... Jamais je n'aurais lancé une rumeur sur mon propre frère, quel intérêt.

Je le regardais poser sa main sur la mienne, arquant un petit sourcil, insinuant t'es sérieux là, car oui, j'étais vexée. Puis en seulement quelques secondes, mon visage se radoucit et je fis un petit sourire « Moui... Bon, c'est pas grave, c'est bien parce que c'est toi, hein », concluais-je en caressant sa main avec mon pouce. Voilà, la preuve que je ne peux pas en vouloir à mon frère jumeau. Pour rien au monde je ne peux rester fâchée avec lui. Rien ne peut être assez important pour justifier de la rancoeur envers lui, ou même une quelconque séparation. Je reprenais ensuite « En même temps, c'était tellement compliqué entre nous, alors bon ça se comprend. Ce qui importe, c'est la relation qu'il entretient avec cette personne, si c'est juste un mec qu'il a embrassé comme ça, ou si il le connait et tout... Bref, on en parlera lui et moi de toute manière. ». Ses derniers propos me firent rire, surtout parce que je ne savais même pas si j'allais pouvoir me contrôler si je croisais le type en question... Oui, ça me fait rire... J'aime me battre, qu'y puis-je. Je répondais, sûre de moi « C'est plutôt lui qui se retrouvera à l'hôpital, un coup entre les jambes et il sera soumis, alors il ne pourra pas me toucher ! ». Je haussais les épaules, grimaçant légèrement « Bah après, il faudrait qu'elle songe à être plus discrète, parce qu'elle laisse la porte ouverte en plus quand elle drague ! ». Je fis une brève pause, le temps de boire une gorgée de ma bière, avant de reprendre « En tout cas, je pensais pas a ruiner sa carrière, je m'en fiche pas mal de ça, franchement... ». Je me retins de lever les yeux au ciel en le voyant affecté par cette histoire, puis en entendant la suite, je me ressaisissais immédiatement. C'était donc pour ça, cette attitude... Cette histoire le vise lui. Je soupirais « Non, je n'en savais rien, étant donné que quand j'ai vu ta prof draguer, c'était Johny, un gars de chez les Hadès, je sais pas comment ils ont pu remonter jusqu'à toi sachant que moi, je n'en ai jamais parlé... ». Je trouvais que s'envoyer un prof, était quelque chose de risquer, et que Teddy n'avait aucunement besoin de se taper le petit personnel, mais bon, je n'avais pas mon mot a dire là dessus. Je réfléchissais un long moment, avant de proposer « On peut trouver un bon truc, une bonne rumeur, pour faire oublier toute cette histoire... Avec tous les crétins qu'il y a au campus, ce sera pas difficile tu sais ». Attendez que j'enquête et que je retrouve celui qui a foutu mon frère dans cette histoire, que je lui ruine sa vie...

Je souriais fièrement en entendant sa réponse. C'est sur que malgré les apparences, je suis une fille qui aime se battre. Je ne cherche pas un prétexte pour le faire, mais si l'occasion se présente, qu'on me provoque, ou quoi que ce soit, j'ai du mal a me contenir. C'est pour ça que je suis traitée d'ailleurs. Durant mes années lycées, j'avais bien connu les crêpages de chignons pendant les soirées, et pendant les entraînements. Enfin, je ne mordais, ni ne griffais, ni ne tirais des cheveux... Non, non moi je claquais, frappais, traînais, cognais... Mais toujours avec classe, inutile de le préciser. J'écoutais Teddy, et je soupirais en voyant à quel point cette situation l’embarrassait. J'esquissais un sourire, lui pinçant doucement la joue « C'est fatiguant mais c'est ça quand on est magnifique et quand on est populaire... », dis-je en plaisant un peu, bien que ce que je venais de dire était vrai. « Les gens qui te jugent trop vite sont des abrutis, ça n'a jamais pu t'atteindre, il ne faut pas que ça commence. », ajoutais-je en toute sincérité, inquiète pour mon frère. Tous les deux, on se moque bien de ce que les gens disent. Notre nom, nos personnalités, font que nous sommes souvent la cible des rumeurs, au centre de toutes les attentions. C'est le prix a payer, quand on est géniaux. Seulement, dans des périodes difficiles, inconsciemment, on se laisse avoir par les rumeurs, et lorsqu'il y en a trop, on se sent affectés, rien qu'un peu... Si, si je vous assure, ça m'est déjà arrivé. Pas depuis que je suis au campus, mais avant, au lycée, j'ai bien connu ça. Je baissais les yeux pour le voir poser sa main sur la mienne, pour les relever et le fixer, un peu hésitante « ... D'accord, si c'est que tu veux, je reste en dehors de ça alors. ». J'allais rester en dehors de cette histoire, mais après, si j'entends quelqu'un parler de Teddy, de cette rumeur, ou quoi que ce soit, je m'en occuperais, je suis obligée. Je vais veiller, tout de même. Je terminais d'un trait ma bière, ayant la sensation de m'écorcher la gorge à cause de sa fraîcheur. Je vous assure que la vie étudiante est bien plus épuisante et difficile a gérer que les études. En tout cas, en ce qui me concerne. Je fis mine de réfléchir un court instant, avant de dire « Non pas vraiment, cette semaine a été particulièrement calme... Il n'y a que Jules qui a rattrapé tout ça... ». A la fin de ma phrase, j'avais affiché un petit sourire, et un air rêveur. Merde, ça devait lui faire drôle quand même. Je secouais légèrement la tête, avant de regarder un peu autour de nous... Il faisait beau, les gens souriaient... C'était agréable, vraiment.

Je savais que tout cela lui pesait, et je détestais le savoir dans cet état. Jeune, et déjà tellement de poids sur les épaules. Je comprenais son état d'esprit, ayant pas mal de pression moi aussi, mais certainement moins que lui. Une chose est sure, si mon frère a besoin de mon aide, ou autre, il pourra toujours compter sur moi. Je ne le laisserais jamais tomber, et je l'aiderais a régler ses problèmes afin qu'il soit serein. Et je m'occuperais de ceux qui lui font du tord, par jalousie ou par simple stupidité. « Hin hin ! », répondis-je en levant les yeux au ciel en riant un peu après sa réponse et son clin d'oeil taquin. Soudain, je vis son visage changer, prendre un air sérieux. Un peu trop sérieux, et contrarié. Spontanément, je sortais, en arquant un sourcil « C'est quoi cette tête. ». Lea il faut que.. que je te parle d'un truc.., je tardais un peu a répondre, inquiète. Je me raclais un peu la gorge avant de dire « ... Oui ? ». Je fronçais les sourcils, le fixant, un air tout aussi sérieux que le sien. Il me faisait peur, une fois de plus, avec une nouvelle qui n'allait certainement pas me laisser de marbre. Je le savais déjà alors qu'il ne m'avait rien dit. Je le connais par coeur. Je secouais un peu la tête « Je ne te jugerais pas, c'est promis... », oh merde, si je promets ça, c'est que je m'attends à quelque chose de gros. Je pose mon coude sur la table, appuyant mon menton sur mon poing, pour l'observer, attendant que mon frère se confie. Il avait besoin de moi, de conseils, et j'allais faire tout mon possible pour l'aider, comme je l'avais toujours fait d'ailleurs.

J'attendais, anxieuse, qu'il m'annonce cette fameuse nouvelle. Il y a une fille, au campus. Elle est enceinte. De moi., mes oreilles se mirent à bourdonner, et mon coude glisser de la table. Je me redressais brusquement pour ne pas me faire emporter par mon élan, restant bouche bée. Je bafouillais quelques mots, un peu sous le choc « Qu... Quo... Pardon ? ». Je passais ma main dans mes cheveux, soufflant un peu pour ensuite me racler la gorge « Enceinte, tu dis... Woaw... ». Un sourire nerveux étirait mes lèvres... Je m'en faisais sérieusement pour mon frère, comment ne pas s'en faire. Mettre une fille enceinte, au campus, à vingt ans... Déjà que ce n'était pas facile, alors là, honnêtement, ça ne pouvait qu'empirer. Oui, je dois l'avouer, je prenais cette nouvelle comme une mauvaise nouvelle. Je me ressaisissais en terminant ma bière pour en commander rapidement deux autres, avant de demander « Et, c'est qui cette fille ?? ». Et si c'était Sahara ? Je pense que je ne me sentirais pas mieux, mais un peu plus rassurée sachant que malgré le peu d'amour que je lui porte par moment, elle est raisonnable et mature. Intérieurement, j'espérais vraiment entendre le nom de la Harrington sortir de sa bouche... Mince alors, si un jour on m'avait dit que je souhaitais voir mon frère terminer avec la brune, j'aurais hurlé de rire...

Je regardais Teddy d'un air interrogateur. Pourquoi aurait-elle des problèmes ? Parce que je lui en causerais si mon frère venait à me révéler son identité ?. Puis en entendant la suite, je compris immédiatement. Je souriais, malgré moi. Je riais même un peu, mais il était clair que je riais jaune. Je venais de comprendre de qui mon frère parlait. Je n'avais désormais plus aucun doute sur l'identité de l'étudiante enceinte de lui... Nous n'étions que trois filles dans le dortoir, donc quand on est logique, on sait que ce n'est pas moi, et je n'aurais absolument pas vu Kôl dans ce rôle là. Toujours avec ce petit rire jaune, je me pinçais l'arête du nez tout en répondant, la voix tremblante « Alors comme ça, c'est Candace que tu as mis enceinte. ». J'inspirais profondément, avant d'expirer bruyamment « Très bien, très bien... », je relevais la tête, posant mes mains sur la table. Je perdais mon regard au loin, une moue blasée sur le visage... Je restais ainsi pendant de longues secondes, roulant des yeux vers mon jumeau, je croisais les bras, tentant de mettre de côté le fait que cette fille enceinte de Teddy se trouvait être Candace, une fille avec qui j'entretiens une relation particulière. J'avalais difficilement ma salive; j'avais les nerfs, vraiment. Pourquoi ELLE ? Il semblait tenir à elle en plus. Le calvaire... « Et donc, qu'est-ce-que je peux faire, moi ? », je marquais une brève pause avant de reprendre « Tu sais pas quoi faire parce que tu le vois déjà t'appeler papa, c'est ça ? », plaisantais-je froidement, tentant de me décontracter un peu bien que cela ne fonctionnait absolument pas. Je me risquais à poser une question assez délicate, sentant son prénom déchirer ma gorge « Tu as des sentiments pour... Candace ? ». Malgré le fait que cette nouvelle m'avait juste sonnée et me déplaisait particulièrement, je tirais doucement sa main pour la prendre et la serrer. Je n'étais pas contre lui, mais de son côté, et je voulais qu'il le comprenne, même si par moment je suis maladroite avec les mots.

Je ne suis pas parfaite, et je ne regrettais pas le comportement que j'avais adopté avec Charles. Il faut dire que ce n'est pas anodin que mon frère jumeau m'annonce qu'il a mit une fille que j'ai parfois du mal à supporter, enceinte. Déjà les femmes prenaient une grande place dans sa vie, alors si en plus il se retrouve avec un gosse sur les bras, qu'est-ce-que je vais devenir moi dans tout ça ? Hein ? Egoïste ? Et alors, c'est mon frère, ma moitié, vous pouvez pas comprendre vous, vous n'avez pas de jumeau alors fermez là. Je séchais, je ne savais pas quoi lui dire sur le coup, et il avait l'air de m'en vouloir pour ça. Cette nouvelle ne me réjouissant absolument pas, je ne me voyais pas lui taper sur l'épaule du style ah mais c'est cool, t'en fais pas, tu vas adorer cette nouvelle vie, avec ta super copine Candace, no stress fréro. Oui, je suis dure, mais je veux son bien, qu'il soit tranquille et qu'il puisse vivre une vie parfaite à vingt ans, et le voilà avec une blonde enceinte, au campus qui plus est. Je me calmais un peu, cessant d'écouter mes pensées négatives et mon agacement face à ses réactions. J'avais posé ma main sur la sienne juste à temps, l'empêchant de partir. Je n'avais rien dit lorsque Teddy avait manifesté son mécontentement face à ce que je venais de dire. Que dire, de toute manière. Je fixais mon frère, roulant des yeux « ... Désolée j'voulais pas dire ça comme ça. », mais c'était sortit tel quel, parce que je pense comme je parle: de manière sarcastique, désagréable parfois, sans forcément le souhaiter. J'attendais désormais sa réponse quant aux sentiments qu'il pourrait ressentir pour Candace. Mon coeur fit un bond dans ma poitrine. Il manquait plus que ça... « Tu te sens mieux avec elle qu'avec n'importe quelle autre ? C'est plus qu'une histoire de sex friends, hein... », je reprenais, retenant un énorme soupir « J'espère juste que c'est pas cette nouvelle qui te fait ressentir tout ça... J'ai pas envie que tu sois malheureux. ». Il fallait que je le rassure, vraiment. Que je sois un peu plus chaleureuse, que je sois... comme je devrais l'être en gros, une bonne soeur. Je changeais de siège, pour me mettre à côté de lui, lui attraper les deux mains, et plonger mon regard, un regard sincère et captivant, pour montrer le mieux possible la sincérité de mes propos à venir « C'est pas parce que c'est Candace, que je t'en veux, ou que je vais lui attirer des ennuis... Je suis pas aussi ignoble que ça, Teddy. T'es mon frère et quoi que tu fasses, je serais toujours là pour toi, de ton côté, pour te soutenir... Rentres toi ça dans le crâne une bonne fois pour toute ! Même si bon, je dois l'avouer, je suis pas très délicate comme fille, mais ça tu l'as toujours su. », lançais-je en riant légèrement, pour le détende un peu. Je le prenais dans mes bras après lui avoir fait un énorme baiser sur la joue « Tout va bien se passer, t'en fais pas. Est-ce-que vous avez parlé tous les deux ? De ce que vous alliez faire, de ce que vous vouliez faire par rapport à ça... ? », concluais-je en me séparant doucement de mon frère.

Je me sentais bizarre en l'entendant parler d'une jeune femme de cette manière. Constater qu'il était aussi attaché à Candace ne me plaisait pas du tout, dans la mesure où il était dans une situation délicate et que j'avais vraiment peur qu'il souffre. Tout ça le chamboulait, sans aucun doute, mais je me trouvais dans le même état que lui. Nous ne sommes pas jumeaux pour rien, hein. Il souffre physiquement, je souffre aussi, il est malheureux, je le suis aussi... Et là, j'étais vraiment dans un drôle d'état, mais je faisais tout pour ne pas le montrer car il n'était pas question de moi mais de mon frère. Il fallait vraiment que je l'aide, que je le réconforte, que je le rassure. Bref. Ses propos ne me plaisaient pas vraiment puis en l'entendant dire c'est un peu comme... une évidence, je me décrispais un peu. Je hochais la tête ; je ne pouvais rien lui dire, je ne comprenais que trop bien ce qu'il pouvait ressentir. L'amertume face à cette révélation me paraissait moins importante en l'entendant parler ainsi. Après tout, peut-être qu'elle n'est pas si mal cette Candace, si au moins elle a le mérite de le rendre heureux... Je me contentais donc de répondre, esquissant un petit sourire « Je vois. ». Je penchais un peu la tête en voyant l'air adorable qu'il prenait en m'écoutant le rassurer, j'avais envie de le serrer contre moi jusqu'à ce qu'il ne puisse plus respirer. Le laisser reprendre son souffle, et le serrer encore et encore... Il y a des moments où j'ai envie de l'avoir contre moi tout le temps. Et là, Teddy est tourmenté, perdu, et a besoin de soutient, de tendresse... D'une épaule sur laquelle se reposer, des bras pour l'enlacer, quelqu'un pour le rassurer. Ce sentiment déteint sur moi, comme la plupart de ses sentiments, c'est ce qui se passe chez les jumeaux qui entretiennent une relation particulière comme la nôtre. Du coup, j'avais encore plus envie de rester avec lui, limite de me greffer à lui tel une soeur siamoise pour m'assurer qu'il garde le sourire, ce si beau sourire, en permanence sur les lèvres, pour oublier ce qui cause son tracas. Je l'écoutais attentivement, fronçant un peu les sourcils, lui accordant toute mon attention. En le voyant aussi nerveux, je lâchais, d'une petite voix « Ca va, fréro, respire... », avant de le laisser poursuivre.

Je réfléchissais, tentant de trouver une solution. « Je comprends tout à fait, mais, même si c'est dur, tente de te dire que pour l'instant, ce n'est pas encore un être à proprement parler, tu vois ce que je veux dire ? Ca ne t'aide peut-être pas, là tout de suite, mais c'est la vérité... Alors il faut que tu essayes de ne pas trop te mettre la pression... », j'avais peur de paraître maladroite, et de le froisser. Je ne mâche que très rarement mes mots, je réfléchis avant de parler mais je ne cherche jamais à atténuer mes propos. Là, j'essayais vraiment d'être plus douce, et de le rassurer comme je le pouvais et de le convaincre qu'il peut encore contrôler la situation, tout comme Candace. Je reprenais « Si tu ne veux pas qu'elle avorte, et elle non plus... Mais que vous n'êtes pas prêt à élever cet enfant, Candace peut toujours accoucher sous X, et l'enfant sera adopté un peu plus tard... Il y a toujours une solution, ne t'en fais pas, Teddy. », pour ensuite le regarder droit dans les yeux, lui faisant un petit regard doux et tendre. Je secouais légèrement la tête, tirant doucement mon frère vers moi. Je prenais son visage dans mes mains « Hé... Mais non. Ca va aller. Même si c'est difficile à croire, c'est pas un drame, d'accord ? Ca peut arriver... ». Oui, ça peut arriver, ce n'est pas forcément quelque chose d'agréable quand on a seulement vingt ans mais c'est comme ça. Je reprenais ensuite, pour dire quelque chose d'assez étonnant -si vous me connaissez bien, vous comprendrez pourquoi- « Même la perfection peut avoir ses faiblesses, c'est bon Teddy... Tu es humain, quand même. », oui beaucoup de gens semblent l'oublier, d'ailleurs.

Je fronçais les sourcils, écoutant attentivement mon frère. Je détestais le voir aussi tourmenté, aussi mal, perdu... Mais j'étais fière, quelque part, en le voyant réfléchir autant, se poser tout de même les bonnes questions, et se montrer aussi responsable. Mon frère n'a jamais été un lâche, c'est pourquoi sa dernière phrase m'avait pas mal froissée. J'attendais un peu avant de prendre la parole, réfléchissant un peu. Après quelques secondes, je reprenais, d'une voix douce, tentant de le rassurer du mieux que je le pouvais en exprimant mon ressenti « Pas forcément. Ca peut vouloir dire que tu veux faire les choses bien, prendre ton temps, ne pas te précipiter. C'est plus délicat que ça, c'est évident mais à vingt ans, tu peux très bien vouloir construire quelque chose avec une personne, mais ne pas vouloir brûler les étapes. Pour avoir un enfant, c'est bien de voir si ce qu'on a construit, ce qu'on vit, est durable, tu vois ce que je veux dire, Teddy ? Pour avoir un enfant, il faut s'assurer d'une certaine stabilité. ». Je soufflais un peu avant d'ajouter « Lâche de quoi... Dis pas n'importe quoi s'il te plait. L'attitude que tu as, c'est celle d'un jeune homme, d'un "gamin" de vingt ans, l'oublie pas ça. Tu te mets trop la pression par rapport aux gens ce qu'on attend de toi, ce qu'on a toujours attendu de toi d'ailleurs... Ton attitude n'a jamais été lâche, tu agissais juste comme un jeune homme, alors arrêtes de dire des choses pareilles... ». Je fis une petite grimace en voyant la réaction un peu brusque de Teddy face à mes propos, puis en entendant l'exemple de nos parents, j'avalais difficilement ma salive, sentant ma gorge se serrer. Je détournais le regard, hochant légèrement la tête... Je me contentais de répondre, perturbée « D'accord, je comprends. ». Je soufflais un peu, tentant d'effacer mes parents de mes pensées, ne voulant en aucun cas penser à eux. Je souris, avant de lui rendre son baiser sur la joue. Je fus touchée par ses dernières paroles, et il m'était impossible de le cacher. D'ailleurs, je n'essayais pas de le cacher. « Plutôt mourir que de te laisser tomber, mon frère. », lançais-je la voix tremblante, esquissant un sourire, perdant mon regard bordé de larmes dans le sien. Abandonner mon frère, ce serait le perdre, et en le perdant, je me perdrais également. Je ne suis rien sans lui...