you belong here.
Encore une fois, il est venu à la fête foraine. Il adore cet endroit. Ça lui rappelle son enfance. En espagne, lorsqu'ils allaient à la foire, dans cette famille nombreuse. Ses petites soeurs, son grand frère, ses "parents". La famille au complet. Pour une journée aussi ensoleillée qu'aujourd'hui, il se plonge avec plaisir dans ses douces réminiscences. Ses parents – les vrais – lui ont toujours manqué, bien sûr. Mais Absolem est comme ça. Il prend les choses comme elles viennent et il faut bien continuer d'avancer, n'est-ce pas ? Il s'imagine les revoir aujourd'hui. Ça fait tellement de temps... Huit ans exactement. Il a souvent voulu aller les revoir. Mais et si ça n'était plus pareil ? Il ne veut pas effacer les beaux souvenirs de son adolescences là-bas. Il continue de marcher en rêvassant, en imaginant leurs voix, en imaginant la façon dont ils auraient grandi. « Absolem ! » Oh, ça lui arrive souvent ! Ses chimères prennent vie sous ses yeux. La voix est parfaite, on la croirait presque réelle tant elle ressemble à celle d'Arya en plus vieille ! Ça semble presque réel. Trop réel. Il tourne légèrement la tête. Son regard croise celui d'une jeune femme. Elle a les mêmes grands yeux chocolats qu'elle avait. Cette petite de quatre ans plus jeune dont il était tombé amoureux lorsqu'il n'était qu'un ado. Au collège alors qu'il terminait le lycée. Habillée dans une robe au couleur des blés, il croit vraiment rêver tant cette vision s'interpose parfaitement avec les souvenirs incandescents qu'il a gardé. Puis elle s'avance. Et c'est seulement au moment où elle se jette dans ses bras qu'il percute. C'est réel. Elle est réelle. Il aurait envie de pleurer. Il la serre alors contre lui, l'entourant de ses bras, humant le parfum de ses cheveux. « Oh.. mon dieu, Arya ! J'y crois pas ! » s'exclame-t-il, un sourire jusqu'aux oreilles. Il la détache doucement de lui et avec cette spontanéité enfantine, la première chose qu'il murmure en détaillant son visage et en posant une main sur sa joue, c'est : « Tu es ravissante... »

Take me as you found me.
Il peine à réaliser. Il croirait rêver ! Lui qui rêvassait justement à eux ... voilà que la perle de ses souvenirs est sortie de son huître pour tomber sur son chemin. Quelle coïncidence, tout de même.. Il se souvient de ce jour où ils se sont recroisés. Entre ambiguïté et retrouvailles, ils avaient chacun appris qu'ils étaient mariés. Absolem avait été jaloux, oh oui, et pas qu'un peu. L'un et l'autre semblaient avoir préféré ne pas se revoir. Peut-être avait-ce été mieux. Peut-être pas, il n'en sait rien, mais il a appris en devenant horloger, que l'on ne remonte pas le temps. « Ça fait si longtemps.. alors qu'on habite au même endroit. » Il hoche la tête, un brin culpabilisé mais souriant, ravi de la revoir, quand bien même serait-elle encore mariée. Elle semble surprise de l'entendre la complimenter, mais pour lui, c'est juste naturel. « Oh.. Merci. » Et elle réplique presque de suite : « Que dire de toi, tu es toujours aussi beau ! » Il rougit. Oui oui, Absolem, c'est un mec qui rougit. Il ne sait pas vraiment comment le prendre – ils sont adultes maintenant, ils se disaient ça quand ils étaient gosses, mais là ça sonne autrement – mais il est flatté. « Merci, c'est.. gentil. » fait-il en détournant un peu le regard, se détachant d'elle à contre coeur. Coeur qui tambourine d'ailleurs, heureux de ces retrouvailles. « Tu sembles être dans ton élément ici. » Il laisse s'échapper un sourire drôlement rêveur et distrait. Il hoche doucement la tête, observant le décor des attractions qui les entoure. « Oui, c'est vrai. Mais si je me souviens bien.. toi aussi. "Petite soeur" », rajoute-t-il avec un sourire affectueux, bien que ça le gêne de l'appeler ainsi alors qu'il en était terriblement amoureux étant plus jeune. Depuis, il s'est mis en tête qu'elle était mariée. Pas pour lui. Elle mérite mieux de toute façon, non ?

Take me as you found me.
Tant de souvenirs se bousculent dans mon cerveau, j'ai l'impression d'avoir de nouveau quinze ans et d'être sur le seuil de cette nouvelle maison, cette nouvelle famille, cette nouvelle vie. Ce que j'aimais bien, c'est que personne ne m'obligeait à faire un deuil digne de la mort de mes parents dans l'attentat ; et c'est ainsi que mon deuil était donc mieux passé. Et puis, j'avais de quoi penser à autre chose. Onze ans, qu'elle avait, quand je suis arrivée. À mon départ, elle en avait quatorze et je ne pouvais m'empêcher de me dire que je quittais une partie de moi. Quelle idée aussi de s'amouracher d'une enfant. Après son compliment, je rougis, c'est plus fort que moi ! Elle avait beau me le dire souvent quand on était enfant, j'ai toujours pris ça "parce qu'on était enfant". Là, on est adulte – même si dans ma tête ça a du mal à s'intégrer et que les gens me le reprochent souvent – et ça prend tout de suite une autre dimension. « C'est pas nouveau de toute façon. » Allez, merci Arya, je rougis de nouveau mais choisis de ne pas répondre, souriant car c'est plus fort que moi. « Oui c'est vrai que j'aime toujours autant les fêtes foraines. » Elle ne dit rien sur le surnom. Je le déteste, moi aussi. Mais c'est comme pour me donner un avertissement à moi-même. Elle m'a toujours trop attirée, c'en est malsain. Et puis elle est mariée. « J'ai déjà mangé une barbe à papa il y a deux jours, mais j'en reprendrai bien une ! Ça te tente ? » Je souris. Je ne peux pas lui résister, c'est définitif ! Mais alors Arya + barbe à papa, il faudrait que j'aie pris un sérieux coup sur la tête pour refuser ça. « Seulement si on la partage ! J'ai pas super faim mais je peux pas refuser une barbe à papa. » C'est surtout à elle que je ne peux rien refuser, en fait. On commence alors à marcher et je suis tenté toutes les deux secondes de la regarder mais je me retiens. Quand elle lève ses beaux yeux vers moi, je les baisse alors un peu pour crocheter son regard. « Alors, quoi de neuf ? » Je hausse doucement les épaules, puis détourne mon regard. J'ai pas envie de lui cacher que j'ai divorcé, et en fait, c'est égoïste et méchant à dire mais j'ai bien envie qu'elle me dise qu'elle aussi. « Eh bien.. Je vis en coloc' avec deux autres filles depuis bientôt deux ans, je supportais pas de vivre seul après mon divorce, tu sais bien comme moi et la solitude, on n'est pas vraiment fait pour s'entendre ! » Je lui souris doucement, observant la foule d'un oeil calme. Calme parce que, sachant que je venais ici, j'ai pris les cachets de mon traitement contre l'agoraphobie. Mieux vaut ne pas faire une crise de panique à cause de la foule, hein ? Elle passe commande et je m'occupe de payer, sans lui laisser le droit de râler. J'attrape timidement son bras pour la tirer un peu à l'écart où on peut s'asseoir sur un banc et déguster notre barbe à papa tranquillement.

Spoiler:

Lights will guide you homme.
J'ai du mal à réellement mettre du recul sur mes retrouvailles avec Arya, j'ai l'impression que j'ai attendu ce jour des années durant. Je peine à ne pas lui montrer mon trouble, à ne pas la dévorer littéralement des yeux, à ne pas la serrer dans mes bras encore plus fort pour lui crier qu'elle m'a réellement manquée. Nous nous dirigeons vers le marchand et je me mets à rire doucement en l'entendant commander la plus grosse. « Je pense que celle-ci est assez grosse, tu crois pas ? » « En effet ! Laisse-moi payer. », je fais en poussant son bras et en tendant un billet moi-même au marchand, sans lui laisser l'occasion de refuser ma proposition. Faut bien se montrer galant de temps en temps hein. Je ne me rends pas bien compte que ma réponse la surprend, parce que je suis occupé à chiper un bout de la barbe à papa et de l'enfourner, savourant son goût sucré. « T.. Tu es divorcé ? T'es plus avec.. Alice, c'est bien ça ? » Elle semble un peu gênée, je le perçois mieux maintenant, mais je souris comme pour la rassurer. Alice, oui c'est bien ça. Alice au pays des merveilles, Absolem... j'avais été stupide de croire que le destin nous jouait un tour amusant et merveilleux. J'attends d'être assis pour lui répondre, cherchant timidement son regard. « Oui, depuis bientôt deux ans. Alice, c'était bien ça. » je murmure avec une certaine nostalgie. Je l'avais aimée. Très fort. Et comme toujours, je m'étais fait avoir. Je détourne doucement le regard, je ne suis pas gêné d'en parler quand bien même je considère ça comme quelque chose de passé. « Je suis désolée pour.. ton mariage. » J'interprète sa gêne comme la preuve qu'elle est encore mariée, elle. Elle doit se sentir mal à l'aise d'être là face à moi, à m'avoir fait des compliments et d'apprendre maintenant que je suis célibataire. Elle doit avoir peur que je me fasse des idées. Mais bon, je m'en suis toujours faites, vous savez. Je pose ma main sur la sienne, lui souriant plus franchement. « Ne le sois pas, tu n'y es pour rien voyons ! Et puis, entre nous et avec du recul maintenant, je considère ça comme une erreur. Je suis bien mieux ainsi, entièrement libre.. » ou comment lui avouer que je ne sors avec personne en ce moment quoi. Soudain gêné de la mettre encore plus mal à l'aise vis-à-vis de son mariage, je détourne le regard sans ôter ma main de la sienne. « Et toi comment ça se passe avec... avec euh.. ton mari ? » Je rougis légèrement, honteux de n'avoir pas même retenu le nom de cet homme que j'ai longtemps haï pour m'avoir volé mon Arya. Je lui adresse un petit sourire discret, comme pour l'encourager, même si je n'ai pas franchement envie de l'entendre me vanter sa vie de couple. Je pioche de nouveau dans la barbe à papa, amusé comme un gosse.

And I'll try to fix you.
Elle ne refuse pas. Je pense qu'elle me connait trop bien pour penser que je la laisserais payer de toute façon. C'est offert de bon coeur. En fait si je pouvais, je lui offrirais tout ce dont elle rêve là maintenant. Eh oui, sur un coup de tête, je pourrais vider tout mon compte en banque pour rendre quelqu'un heureux. Encore plus quand il s'agit d'Arya. « Merci c'est gentil.» Je lui réponds simplement d'un sourire. J'aimerais juste la remercier d'être là, d'exister, de m'être revenue. Mais à la place, je me tais. Dérisoirement, je ne suis pas prêt à lui dire tout ça. À lui dire comme je rêvais d'elle quand elle était trop jeune pour se prêter à ces jeux, à lui dire comme je maudissais la fatalité de m'avoir fait tomber dans sa famille et de l'avoir pour une espèce de soeur pour laquelle mon amour était impossible. « Deux ans déjà.. » Je hoche la tête, baissant les yeux. Deux ans, oui. Depuis, plus vraiment de relation sérieuse, je crois que j'avais été servi avec Alice. « Qu'est-ce qui s'est passé ? Vous aviez l'air si.. bien ensemble, j'ai du mal à y croire. » Je la comprends. Je la disais femme de ma vie. Je les dis toutes les femmes de ma vie lorsque ça tourne au sérieux. Parce que moi j'y crois à fond. Parce que je suis ce type à tomber toujours de haut, toujours plus profond, mais qui repart à chaque fois tout de même. Je hausse doucement les épaules, prenant mon temps pour lui répondre. Je relève les yeux pour les poser sur Arya. « Elle me trompait. Depuis un an déjà. Je l'ai découvert environ six mois avant notre séparation, et je lui ai donnée une seconde chance. Puis quand je l'ai surprise de nouveau, j'ai demandé le divorce. » Parfois, je me désespère à être si con, si naïf, si peu méfiant avec les pires créatures de la terre : les femmes. Je soupire et hausse de nouveau les épaules, d'un air de dire que c'est du passé. « C'est de l'histoire ancienne. » Je fronce les sourcils, surpris. Elle m'en parle comme d'un soulagement. Etait-elle malheureuse avec lui ? Comment ai-je fait pour ne m'apercevoir d'absolument rien ? « J'ai demandé le divorce, je ne supportais plus rien chez lui. » C'est traître mais j'ai un sourire sur les lèvres dès qu'elle prononce ces mots, que je tente tant bien que mal de camoufler en me mordillant la lèvre inférieure. Je baisse les yeux, gêné de réagir ainsi. « Oh je.. je suis désolé, je ne savais pas, ça fait longtemps ? Enfin, j'suis désolé, tu dois te dire que je m'en réjouis mais c'est pas vrai ! Enfin si un peu parce que... Enfin non c'est pas ce que je voulais dire... Bon, je m'embrouille. » Je me mets à rire, gêné, me mettant même à rougir. Bien, Absolem, vraiment bien quoi ton explication, c'est très clair. Mais comment est-ce que je peux le lui cacher hein ? Oui, je suis content d'apprendre qu'elle est célibataire, est-ce un crime ?