Jetant un coup d’œil à l'horloge surplombant la piscine de l'université, Winter sortit de l'eau et se dirigea vers les vestiaires. Presque midi, l'heure pour lui d'aller secouer quelqu'un et de l’entraîner il ne savait pas encore trop où. Qui ? Il avait vu sa meilleure amie le jour précédent, tandis que cela faisait plus longtemps pour Jo. Jo, sa jumelle si on omettait volontairement le fait qu'ils n'avaient pas les mêmes parents, ni les mêmes origines puisqu'elle était française et lui irlandais, ni exactement le même age. Bref, jumeaux dans la tête et c'était le plus important. Ils passaient leur temps ensemble, de temps à autre Winter se réveillait en pleine nuit et la trouvait dans son lit, ou inversement. Ce n'était plus arrivé depuis trois ou quatre jours, et cela lui manquait déjà. Le bon côté de ce type de relation, ils n'étaient pas victimes de stupides disputes familiales car ils n'avaient pas réellement le même sang. Pour tout dire, ils ne s'étaient encore jamais disputés. Rhabillé en deux temps trois mouvements, il jeta sa veste sur ses épaules et sorti du complexe sportif pour se diriger vers les dortoirs. Balançant son sac de sport dans son dortoir sans regarder où il atterrissait, il vérifia qu'il avait son portable et son porte-feuille sur lui et fila direction la maison des Hadès. Là-bas, ils avaient tous pris l'habitude de le voir passer, sa venue n'étonnait plus personne. Pénétrant dans le dortoir cinq sans prendre la peine de frapper, Winter balaya la pièce des yeux, son regard se portant directement sur le lit qu'occupait Joséphine. Elle n'y était pas. « Oh, dommage, moi qui pensais pouvoir te faire tomber du lit. » Oui, il était midi passé d'une dizaine de minutes, mais allez savoir. Il entendit alors le son de l'eau coulant dans le lavabo et pivota vers la salle de bains. Entendant sa chère Jo chanter, il sourit et s'avança. « J'espère pour toi que t'es habillée parce que j'entre ! » s'exclama-t-il au moment même où il ouvrait la porte de la salle de bains du dortoir. Au pire, elle lui jetterait un truc au visage et il sortirait, cela ne les dérangeait pas plus que cela, là où d'autres auraient été totalement complexés et gênés. Par chance, elle était bel et bien habillée. « Je cherche une jolie fille à emmener au Hungry Man, tu connais quelqu'un ? » fit-il avec un large sourire, appuyé dans l'encadrement de la porte.

Jogging matinal, dès six heures du matin, accompagné de son pitbull Callum, suivi d'un bon petit déjeuner de sportif et, une heure plus tard -afin de bien respecter la règle- quelques plongeons dans la piscine de la JIU. Winter avait pris cette habitude dès son retour à Jersey, quelques mois plus tôt. Il commençait par un jogging, toujours à la même heure en empruntant exactement le même chemin, puis il petit déjeunait et ensuite c'était un sport au choix. Il avait évidemment une vaste sélection étant donné qu'il avait dû essayer à peu près tout les sports du monde au moins une fois dans sa vie. Même les plus ridicules, oui oui. Il était curieux de tout, et on ne se refait pas. Revenant sans trop se presser vers son dortoir qu'il savait vide, il y abandonna son sac de sport en vitesse afin que son chien ne déboule pas en courant vers lui et ne lui fasse les yeux doux pour le supplier de l'emmener à nouveau en balade. Traversant la maison des Poséidons sans croiser grand monde, le jeune homme rejoignit celle des Hadès où, avons-le, il ne savait pas ce que Joséphine faisait. Elle n'était pas comme eux, du moins pas comme la plupart. Enfin, chacun son truc et ses raisons, tant qu'elle demeurait aussi amusante, charmante et totalement barrée comme il l'aimait, tout allait bien. Fredonnant une chanson dont il avait totalement oublié le titre et dont les paroles lui échappaient un peu, il poussa la porte du dortoir numéro cinq sans apercevoir Jo. Jusqu'à ce qu'un bruit dans la salle de bains n'attire son attention. Il fit volte-face, pénétra dans la pièce adjacente et décocha un large sourire vaguement charmeur à la jeune femme, pour bien s'accorder avec sa question. La réponse lui tira un léger rire, comme s'il était du genre à sauter sur la première venue, fraîchement célibataire qui plus est. Pour tout dire, il n'était pas tellement intéressé par une relation. Contrairement à ces gens qui cherchent désespérément l'amour ou attendent avec impatience qu'il frappe à leur porte, Winter se contentait de vivre au jour le jour sans y accorder la moindre attention. Au fond, il doutait que quiconque veuille d'un homme comme lui. C'était un peu son sujet sensible, il ne se pensait bon pour personne et préférait de loin garder son handicap relationnel -comme il l'appelait- pour lui. « J'irai bien la réveiller d'un baiser tel le prince dans La Belle Au Bois Dormant mais j'ai trop faim là. » Bien sûr, bien sûr ! Il lui fit un clin d'oeil et accueillit sa bise avec un sourire, avant de la suivre du regard. « Let's go, Jo... » Enthousiaste comme à son habitude, il sortit le premier puis se mit à sa hauteur. Il attendait presque avec désespoir qu'elle dise quelque chose, mais elle ne semblait pas décidée à lui raconter quoi que ce soit. Accordant un sourire ou deux aux gens qu'ils croisaient, il prit finalement l'initiative d'engager la conversation, posant son regard sur elle tandis qu'ils sortaient enfin de l'université direction la ville en elle-même. « T'es pas très bavarde, une chance qu'on ait pas besoin de parler là où on va ! » Manière à peu près subtile de lui tirer quelques mots pour pouvoir enchaîner sur ce qu'il y avait de potentiellement neuf dans sa vie.

Mélodie, pour tout dire si sa jumelle de cœur ne lui avait pas rappelé ses propres mots, il ne se serait pas souvenu de qui il s'agissait. Oui, cette fille était plutôt jolie et attirait les regards sur elle, aussi bien ceux des hommes que ceux de femmes jalouses. Certes, elle était à son goût, mais elle était bien trop chochotte. Il aimait les filles avec un minimum de caractère, une personnalité à elles et non des airs empruntés à leurs idoles. Quelqu'un comme Jo, c'est bien pourquoi il s'entendait tellement bien avec elle. Le coup de coude dans le côtes, classique, et un peu trop fort mais Winter ne lui en tint pas rigueur. Pour tout dire, il ne se focalisa pas. Quand je dis qu'il n'y connait absolument rien en attitude féminine, ce n'est pas pour rigoler. Il ne voyait rien. Il fit mine de se vexer, tout en sachant pertinemment qu'elle ne le lâcherait pas de sitôt avec cette histoire. Un peu comme lorsqu'il avait avoué à sa mère être amoureux d'une fille lorsqu’il avait seize ans, tout de suite elle n'avait cessé de lui rabâcher les oreilles avec cela et, étonnamment, de le pousser à l'inviter au cinéma. Sa mère était bizarre, il en l'avait jamais comprise. Mais c'est aussi pour cela qu'il l'aimait. La grimace de Jo, cette fameuse moue qu'il ne supportait pas et qui le faisait grimacer à son tour, lui fit lever les yeux au ciel. « Bonjour Raiponce ! » Evidemment qu'il était le prince charmant ! Comment osait-elle en douter ! Alors qu'ils se mettaient en chemin, le petit hockeyeur se rendit bien compte qu'elle n'était pas comme d'habitude. Avait-il fait ou dit quelque chose de mal, ou étais-ce cette ridicule histoire au sujet de cette fille ? Peut-être tombait-il au mauvais moment et n'avait-elle pas envie de le voir... Chose qui ne s'était encore jamais produite, chose qui lui déplaisait grandement et le mettait plutôt mal à l'aise. Il n'avait pas très envie d'aborder le sujet directement, après tout il ne tenait pas à avoir la réponse. Si c'était bel et bien de sa faute, il ne voulait pas trop le savoir... C'est pourquoi il lança la conversation en dérivant un peu. Par chance, elle renchérit sur un sujet totalement dérisoire. « Ouuuuh, la jalouse ! » sourit-il tel un enfant dans la cours de récréation prêt à chanter "ouh la menteuse, elle est amoureuse". Mais il passa sous silence cette jolie petite chanson qui lui revint soudainement en mémoire. Penser à elle, n'importe quoi... « Surf, volley, jogging, basket, muscu... et beaucoup d'entrainement pour mon match de hockey du 30. » Comme à son habitude, sport, sport et encore sport. « A part ça j'ai passé du temps avec Serena et j'ai été un peu obligé de rendre visite à ma mère. C'est à peu près tout j'crois. » Serena, sa meilleure amie, avec qui il avait passé une soirée délirante le jour précédent, justement. Et sa mère, ouh, lorsqu'il n'allait pas la voir elle le faisait bien remarquer ! Sortis de l'université, ils marchaient tranquillement lorsqu'il lui retourna la question: « Et toi, qu'est-ce que tu fais quand je ne suis pas auprès de toi et que je te manque énormément ? » Cette dernière réflexion attira sur eux les regards de certaines personnes, et il éclata de rire. En dehors tout comme dans l'université, certains les croyaient ensemble. A leurs yeux, c'était une idée plutôt ridicule. Sort-on avec sa soeur jumelle ? Non, c'était la toute simple question que posait toujours Winter aux personnes qui lui demandaient s'il se passait quelque chose entre Jo et lui. Avec tout cela, il passa presque devant le restaurant sans le voir. Ils se stoppèrent net devant le Hungry Man et il alla au devant de Jo, lui tirant une chaise tel un gentleman digne de ce nom. « Mademoiselle... »

Face à l’agressivité tout à fait inhabituelle et inattendue de Jo, le jeune homme préféra se taire et se contenta de presser le pas pour se remettre à sa hauteur. Que lui arrivai,-il soudainement ? Elle était distante, peu bavarde et se mettait dans un état fou pour une simple plaisanterie. Elle ne lui avait jamais parlé ainsi, jamais elle n'avait haussé le ton en sa présence. Et il aurait vraiment préféré que cela reste ainsi. C'est pourquoi il accueillit le changement de sujet avec plaisir et en profita pour retrouver un semblant de bonne humeur. Le sport, il suffisait de lui en parler pour le rendre joyeux, c'est fou. « Je compte sur toi, j'ai besoin de tout le soutien possible. Puis si t'es pas là je vais jamaiiiis y arriver. » C'est clair qu'il avait besoin de savoir que sa "jumelle" était avec lui à deux cent pourcents. Il n'imaginait plus du tout sa vie sans elle. « Pour le rugby, c'est quand tu veux ! J'adore ! J'adore tout les sports en fait... » C'est là qu'il se rendait compte à quel point il était parti dans son délire de sports sports sports ! Quant à sa mère, elle allait très très bien, il tenait cela d'elle. « Elle va bien, elle se plaint beaucoup que j'aille pas la voir très souvent mais elle se porte à merveille, merci. » S'il souriait lorsqu'elle commença à parler, il se rembrunit un peu lorsqu'elle parla de Serena. Quelque chsoe clochait vraiment et ce même un type aussi peu doué en sentiments que lui le voyait. Un aveugle l'aurait vu ! C'était flagrant. Mais il ne parvenait pas à identifier le problème, ni à en cerner parfaitement la cause. Le genre de truc qui l’énervait encore plus, ne pas comprendre. « Hum... Serena va bien aussi. » se contenta-t-il de dire, soudainement refroidi par la tournure que prenait leur conversation. Il finit par lui retourner la question, une fois qu'il eut fini de penser à l'étrangeté de son comportement. Et il reprit ses réflexions à ce sujet dès qu’elle ouvrit la bouche. Elle qui se faisait d'habitude une joie de lui raconter tout et n'importe quoi, se montrait évasive. Une forte envie de se mettre à crier qu'il voulait comprendre, s'emparait doucement de lui, mais il se contint. Du calme, autant que l'un d'eux soit posé. « Des trucs, d'accord.. J'espère que tes trucs étaient cool. Pour remédier à cela, tu peux passer la nuit dans mon dortoir, y'aura personne et si te faire sauter dessus par Callum ne te dérange pas je serai ravi de t'accueillir. » Il priait pour qu'elle accepte, autrement il y aurait un gros souci et il serait premièrement très déçu, deuxièmement en totale remise en question. Il avait toujours tendance à penser que les choses venaient de lui plutôt que des autres. Lui ouvrant la porte avec un large sourire, il la suivit et s'assit en face d'elle à la table qu’elle avait choisie. « Ready, je garde en tête que j'ai quatre coupes et des années d'entrainement derrière moi. Et puis avec le soutien de dingue que je vais avoir, ça pourrait pas être mieux ! Merci pour ta confiance. » Un serveur les rejoint, et il commanda un burger ainsi qu'un Coca-Cola avant de se tourner vers Jo. « Et pour toi ? » Evidemment, il comptait payer. Et puis quoi encore !

« Banderole, cris d'encouragement, tout ce que tu veux ! » Ils étaient de bonne humeur, enfin, mais ce n'était toujorus pas cela. Toujours pas cette magnifique relation fusionnelle de jumeaux qu'ils entretenaient auparavant. Cela en approchait un minimum, c'était déjà cela... Winter accepta évidemment de se faire une partie de rugby avec elle. C'était un très bon sport, il aimait assez. Bien que rien ne dépasse le hockey à ses yeux ! Sa question lui tir un sourire. « Je sais à peu près dropper oui, disons que ça va pas toujours là où il faut mais avec un peu d'entrainement je devrais y parvenir, aucun sport ne me résiste ! » Véridique, il ne se jetait pas des fleurs. Ce n'était pas son genre. Le sujet dériva sur sa mère, ce qui le fit sourire. Sa famille, sa seule famille. Il n'avait que sa mère depuis ses sept ans... Il s'en portait très bien. « Ce serait cool qu'on y aille tout le deux, elle sera ravie de te revoir ! » En tant que jumelle de coeur officielle, Jo était presque comme la fille de madame Forks. Logique. Ils se rembrunirent tous deux lorsqu'ils abordèrent le sujet de Nena. Winter adorait la jeune femme, peut-être même un peu trop se disait-il parfois, mais il n'y avait pas de quoi se mettre dans un pareil état. Décidément, il ne comprenait rien. Il serra les dents pour ne pas s'énerver face à cette sorte de reproche que venait de formuler Joséphine. « On se voit souvent, si c'est ce que tu insinues. On est meilleurs amis, c'est normal qu'on passe du temps ensemble. » Calme et posé, la meilleure façon de répondre à cela... Elle se mettait à parler et agir comme une femme jalouse, mais dans l'esprit de Winter ce ne pouvait être ça. La suite lui fit serrer les mâchoires à s'en faire mal. « J'ai pas demandé de détails Jo. » A son tour d'être un peu plus sec que d'ordinaire. Il ne fallait pas lui parler de soirées arrosées. Trop tard, il avait déjà à l'esprit l'image de sa "jumelle" en train de se saouler... « Ok, une autre fois peut-être. » Il était déçu. Terriblement déçu, et attristé. Ses partiels étaient terminés, il le savait, elle le lui avait dit quelques jours plus tôt. Pourtant, il ne releva pas. Il baissa la tête et tenta de retrouver son sourire. Il y parvint après maints efforts, et juste à temps pour le repas. Son regard plongé dans le sien, il lui sourit pour se donner une contenance, puis commanda à l'arrivé de la serveuse, à qui il rendit son sourire par politesse plus qu'autre chose. Lorsque la commande fut passée et que la jeune serveuse disparut, il reposa son regard sur Jo. Ses paroles sonnaient faux et, ne la connaissant que trop bien, il se doutait que c'était du vent. Il ne releva pas. Il baissa les yeux sur la table, faisant mine d’observer le menu alors qu'il avait déjà commandé un burger. Il ne dit plus rien jusqu'à ce qu'ils soient servis, et il se jeta sur son repas pour éviter d'avoir à dire quoi que ce soit.

Aucune fille ne te résiste non plus, apparemment. Il faillit s'étrangler avec sa propre salive lorsque ces mots parvinrent à ses oreilles. Winter n'était pas un tombeur, et si ce qu'elle disait était vrai il ne l'avait jamais remarqué. Pour tout dire, il n'y croyait pas une seule seconde. L'ironie de Jo était palpable, une fois de plus, et cela le dérangeait. « Ça j'en doute. » baragouina-t-il plus pour lui-même qu'en réponse à ses propos... Le sujet dériva sur sa mère, conversation qui les faisait tout deux sourire. Jusqu'à ce qu'il perçoive une pointe de tristesse chez la jeune femme. Normal, ses parents étaient morts, elle n'avait pas de contacts avec ses frères et plus vraiment de famille. Il ne s'imaginait pas une minute sans sa mère. Afin de la réconforter un minimum, il glissa sa main dans la sienne et lui sourit avant de lui dire le plus sincèrement du monde: « Elle n'a aucune raison de ne pas l'être, t'es pas n'importe qui. » Elle était spéciale. En tout, pour tous. Mais surtout pour lui. Elle était sa jumelle, SA Jo, il la connaissait pas cœur. Mais il commençait à perdre cette parfaite connaissance de sa personne. Il ne comprenait plus bien. Surtout cette hostilité envers Serena. Les derniers mots de son amie lui restèrent en travers de la gorge. Étais-ce de la jalousie qu'il percevait là ? Elle n'avait rien à envier à Nena, tout comme celle-ci n'avait rien à envier à Jo. Elles étaient différentes et c'était là ce qu'il aimait en elles deux... Cette après-midi qu'il s'imaginait aussi délirante et fun que d'habitude virait à une conversation glaciale. Leurs sourires n'étaient plus que vagues esquisses, vaines tentatives. Chaque mot devenait sujet de conflit. Et Winter était perdu...« Personne n'est parfait Jo... » fit-il d'une voix sans ton. Leur entrée dans le petit restaurant côtier signait le début de la fin. Comment pouvaient-ils se montrer si distants l'un envers l'autre ? Il tenta à son tour de lui sourire tandis que la serveuse s'éloignait, mais il ne fi pas beaucoup mieux qu’elle et finit pas baisser les yeux. Le regard rivé sur les bulles disparaissant peu à peu dans son verre, il mâchait lentement, pensif. La voix hésitante de son amie le fit réagir, il quitta ses songes et posa les yeux sur elle. A temps pour la voir se lever. Il suivit ses gestes sans comprendre ce qu’elle faisait. Son cerveau refusait d'assimiler les informations, d'admettre qu’elle partait. Il avala rapidement, manquant s'étouffer avec un bout de viande. Trop tard, elle partait. Trop tard ? S'avouer vaincu si facilement n'était pas son genre. « Jo... » Il sauta presque par dessus la table, et se planta devant elle, lui barrant la route vers la sortie. Il lui saisit doucement le poignet et plongea son regard dans le sien. Ses yeux bleus étaient emplis de larmes, et il ne savait même pas pour quelle raison. La monstrueuse pensée que ce devait être de sa faute lui broyait le coeur. « Hey, pleure pas Jo... Et ne pars pas, s'il te plait. » Il sentit de nombreux regards se poser sur eux, mais cela n'avait aucune importance. « Qu'est-ce qui t'arrive ma puce ? T'es bizarre depuis tout à l'heure, est-ce que... Par hasard... Est-ce que j'ai fait quelque chose de mal ? » Sa voix se voulait apaisante et il espérait vraiment avoir une explication. Il n'aurait pas supporté de rester planté là sans comprendre et de la voir partir sans rien savoir de plus...

Incompréhension totale mêlée d'impression de culpabilité absolument douloureuse, cela semble être un bon résumé de l'état dans lequel se trouvait Winter. Il ne comprenait pas, ça le torturait. L'ambiance lui déplaisait, cela le mettait mal à l'aise. Et il se sentait affreusement coupable d'une chsoe qu'il ne parvenait à identifier. Tout les malheurs du monde pesaient sur ses épaules, bien qu'il n'en ai pas vraiment l'air il était sensible. D'autant plus depuis qu'il s'était retrouvé, du jour au lendemain, abandonné par son père. Encore un peu plus lorsqu'il avait été expulsé de son pays natal adoré. Et plus encore depuis qu'il avait fait ce magnifique voyage humanitaire et avait été au contact de personnes pareilles... Bref, tout cela pour expliquer que malgré ses airs assurés, l'impression de force qui se dégageait de lui et tout ce tralala de bonnes ondes, il était facilement touché, ébranlé, et se trouvait rapidement mal à l'aise dans de telles situations. Très empathique, pour ne rien arranger, il ne pouvait que compatir avec les diverses émotions de son amie. Il la vit se lever, mais son cerveau mit quelques secondes à réaliser. Ce petit décalage lui laissa le temps de s'éloigner en direction de la porte. Hors de question de la laisser quitter ce restaurant sans lui. Sans explications. Sans rien. « Jo... », fit-il à nouveau, peu convaincu lorsqu'elle lui dit avoir des choses à faire. Quant au fait de ne pas pleurer, il n'était pas né de la dernière pluie, il savait encore reconnaître des larmes lorsqu'il en voyait. Mais, dans les yeux de Jo, il n'en avait jamais vu. Ou seulement de rire, mais celles-ci n'étaient pas le moins du monde du même type. A son grand désespoir... Il sut qu’elle ne lui dirait rien avant même qu’elle n'ouvre la bouche. Il croisa son regard et vit son expression changer. Un infime changement mais il la connaissait suffisamment que pour le voir instantanément. Son agressivité soudaine, il s'y attendait. Mais qu’elle remette Serena sur le tapis le mit en colère, lui aussi. Aux yeux des autres clients, cela devait ressembler à une dispute de couple. C'était presque cela. « Arrête avec ça, c'est pas par... JO ! » Pas pareil. Serena était Serena, sa meilleure amie, proche mais a m i e. Jo était Jo, sa soeur jumelle, la seconde femme de sa vie (après sa mère quoi, évidemment). Il ne captait plus rien. Il cria son nom tandis qu’elle sortait sans se retourner. Serrant les poings, il se retint de shooter dans quelque chose. « MERDE ! » Pour ne pas dire pire. Il jeta un billet sur la table et poussa violemment la porte, s'éloignant en direction de la plage pour se laisser tomber sur le sable fin. Ou plutôt pour s'écraser dessus. Et ne plus bouger deux heures durant...