« Lizzie rend le moi ! » lançais-je du haut de mes six ans et plus envieux que jamais après que j'aie vu Lizzie s'amuser avec le jouet que lui avait donné quelques minutes plus tôt parce qu'il m'ennuyait. Elle affichait un regard déçu, mais elle finit par pouffer de rire telle la gamine qu'elle était puis elle lui dit « si tu veux le revoir va falloir venir le chercher Max ! » Elle partit alors à courir dans tous les sens et je fis de même lorsque je réalisais le jeu auquel elle voulait jouer. Lizzie n'avait que cinq ans, mais elle était déjà en voie de devenir une chieuse de première catégorie. J'avais finis par la rattraper et nous étions tous les deux tombés sur la pelouse de la cour arrière de ma maison. On riait aux larmes alors qu'on tirait chacun de notre côté le précieux jouet. Enfin, précieux, la seule raison pour laquelle on le désirait c'est que l'autre en voulait. Ce qui était réellement précieux même si moins et Lizzie n'en étions pas conscient c'était lien qu'on nouait tous les deux. « Bon d'accord, je te le rends Max, t'es même pas drôle » lâcha Lizzie avant de me le remettre et d'aller aux balançoires que mon père avait fait installer. À peine avais-je récupérer mon jouet que je le balançais Dieu seul sait où dans ma cours pour ensuite rejoindre Lizzie en courant. Je m'installais sur la balançoire à côté de celle de Lizzie qui elle se balançait déjà depuis une dizaine de seconde, on échangea un regard complice puis sans qu'un seul de nous n'ait à dire un mot commença à faire une compétition pour voir qui irait le plus haut avec sa balançoire. « J'ai gagné » criais-je lorsque j'eus atteint la limite de la balançoire. « Même pas vrai d'abord ! C'est moi qui ait été la première » me répondit-elle en tirant la langue. Toujours sans dire un mot on se fixait du regard pour finalement sauter de notre balançoire pour voir qui se rendrait le plus loin. J'atteignis le sol en premier, mais je fis exprès de rouler pour me rendre plus loin. « J'ai encore gagné ! » lançais-je tout fier de moi même si je savais que j'avais triché. « Menteur ! Je t'ai vu, tu as triché ! » Me répondit-elle en colère pour finalement me tourner le dos et aller au bac à sable. Je la rattrapais aussitôt et lui dis « tu me pardonnes Lizzie? ». Elle fit semblant de ne pas m'avoir entendu pendant quelques secondes puis elle se retourna vers moi le sourire aux lèvres « seulement si tu acceptes d'être mon prince charmant et de m'épouser ! » lança-t-elle avec des étincelles dans ses yeux d'enfant innocente. « Je suis d'accord, mais ne le dit pas à maman elle ne serait pas d'accord » disais-je à Lizzie qui approuva d'un hochement de tête. Cela devait être nos 1000e fiançailles environ puisqu'on se mariait au moins une fois par semaine depuis que j’étais venu au monde. À chaque fois l'un de nous deux rompait les fiançailles parce que l'autre piquait un jouet ou s'amusait avec une personne qu'on n'aimait pas. Mais à tous les coups on se fiançait de nouveau d'ici la fin de la semaine et ça signifiait qu'on se pardonnait. On était amoureux, on ne comprenait pas réellement ce que signifiait l'amour et ce que ça impliquait, mais cela ne nous empêchait nullement de dire à tout le monde qu’on était amoureux. C’était assez bizarre, mais l’inceste c’était notre truc à moi et ma sœur quand on était gosse.

Notre amour, nos fiançailles, nos ruptures de fiançailles, nos fiançailles de pardon, tout ça perdura durant plusieurs années comme s'il s'agissait d'une tradition, la seule différence c'est que nous n'utilisions plus réellement les mots mariage, fiançailles, prince et tout ça vers la fin. On avait vieilli et maintenant c’était simplement notre relation frère-sœur fusionnel qui se détériorait à l’occasion et se reprenait de plus belle par la suite. Cette tradition prit fin lorsque ma famille et moi-même sommes retournés dans notre pays d'origine de ma mère, le Canada, mais sans ma sœur qui est resté chez mon oncle paternel pour une raison mystérieuse. J'avais 10 ans quand c'est arrivé et ça m'attristait de devoir laisser Lizzie derrière moi. On s'est donc perdu de vue durant de nombreuses années, jusqu'au lycée pour être plus exacte, c'est au moment de la rentrée que je suis revenu vivre à Chicago et que moi et Lizzie on s'est retrouvé dans la même classe de science. On avait pas mal grandit durant toutes ces années, mais dès mon entrer dans cette classe j'ai vu cette fille qui plaçait ses choses sur une table du fond de la classe et je savais qu'il s'agissait de Lizzie. On avait le droit de choisir nos places et c'est sans hésiter que je m’assoyais à côté de cette fille. « Ça fait du bien de te revoir Lizzie... » lâchais-je timidement. « Max...? Max c'est vraiment toi...? » dit-elle les yeux émerveiller. Nos regards se croisèrent et dès lors je su que confirmer qui j'étais serait inutile, elle avait eu sa réponse avec ce bref regard. Depuis ce jour on est officiellement redevenu un duo inséparable, À partir de là c'était moi et Lizzie contre le reste du monde. On savait tous les deux que peu importe ce qui nous tourmentait on avait quelqu'un à qui en parler. On savait tous les deux que peu importe ce qui se passerait il y aurait toujours quelqu'un pour nettoyer nos bêtises derrière nous et nous tendre la main. Entre nous il n'y avait pas de sujets tabous et encore moins de problèmes qu'on ne pouvait pas résoudre ensemble. Ensemble on ne pouvait qu'être heureux. L’un sans l'autre nous n'étions pas l'ombre de nous-même.

Le temps passa, l'eau coula sous les ponts, la vie se compliqua puis mes rêves d'enfance se brisèrent les uns après les autres. Tous sauf un... Lizzie et mon rêve qu’elle moi quittions nos foyers respectifs pour vivre ensemble. Les études à Yale que je planifiais depuis des années ne m'intéressaient plus du tout et ça avait anéanti mon père de l'entendre, car mon père avait fait fortune avec le métier d'avocat et me souhaitait bien évidemment le même prestigieux parcours académique et professionnel. C'était ancré dans ses idéaux. Depuis que je lui avais annoncé, il ne cessait plus de me dire que je fonçais droit dans un mur, que je gâchais ma vie, que Lizzie avait une mauvaise influence sur moi et finalement qu'il me couperait les vivres. Un jour j'en ai eu assez et j'ai confronté mes parents. « Papa, maman, je m'en vais. J'en ai marre que vous critiquiez chacun de mes choix et que vous mettiez tout sur le dos de Lizzie. Je l'aime, même si vous l’avez viré de la maison pour dieu sait qu’elle raison elle demeure ma sœur et avec elle, on a décidé de vivre ensemble parce qu’on s’entend super bien et qu’on en a marre d’être séparé... » Je n'eus pas le temps de finir que le regard foudroyant de mon père me perturba. « Lizzie... toujours cette foutu bonne à rien... » Lâcha-t-il d'un ton glacial. Il n'avait pas rajouté un mot de plus que je connaissais le jolie sermon qu'il allait me donner du premier mot jusqu'au dernier. C'est à cause d'elle que tu as lâché tes études, elle a une mauvaise influence, elle va gâcher ta vie, dans même pas 2 ans vous en aurez marre. Toujours la même rengaine. « Arrête papa ! Fait juste te la fermer pour cette seule et unique fois ! Je ne suis pas là pour discuter ou négocier, je suis là pour vous annoncer une décision qui est déjà prise et rien au monde ne la changera, surtout pas l'avis de mon père fermé d'esprit et borné que j'ai déjà entendu trop de fois. Je me casse, assume ta responsabilité dans mon départ et ferme là je veux rien entendre plus. » Suite à cette petite dispute, j'ai été prendre mes valises dans ma chambre et je suis parti de la villa familiale en courant, j'allais rejoindre Lizzie chez elle. J'avais hâte de lui dire que j'étais fin prêt à partir, que j'étais fin prêt à vivre le reste de ma vie avec elle comme seule famille. Elle, elle pouvait partir sans même que sa famille ne remarque son absence, l’oncle et la tante chez qui elle vivait sont des junkys et le cousin s'éloigne de cet enfer familial, il n'est pratiquement jamais à leur domicile. Au fond je me dis que c'est peut-être mieux comme ça, Lizzie n'aurait pas à connaître une vaine dispute d'au revoir comme celle à laquelle j'ai eu droit. Mais arrivé chez elle tout ne se passa pas comme prévu. Alors que je prévoyais que Lizzie dise qu'elle parte à ses parents et que une semaine avant qu'ils ne captent ce qu'elle leur avait dit on serait partie et bien j'ai plutôt eu le droit à une claque en pleine gueule. Elle m'annonça qu'elle avait changé d'idée, l’oncle et la tante avaient arrêtés la drogue, elle avait été acceptée à une université locale et elle se sentait bien ici à Chicago. Déception, trahison, dévastation. Voilà qui résumait bien la situation de mon point de vue. Quoi qu'il en soit moi je n'ai pas changé d'avis, je suis parti, je lui ai bien dis que si elle m'aimait vraiment elle serait libre de me rejoindre à Jersey, on avait choisi cette ville ensemble pour notre nouveau départ... maintenant il ne serait que mon nouveau départ à moi et il me coûterait ma famille, pas seulement mon père et ma mère, ma sœur adorée dont j’avais été cruellement séparée également.

J’avais 18 ans lorsque je commençais à défaire mes boîtes dans mon nouvel appartement sur l’île de Jersey. Oui comme vous pouvez le constater j’avais réellement été jusqu’au bout de ma décision de continuer mon rêve sans Lizzie. Elle m’avait abandonné, peut-être qu’elle n’était pas mieux que les autres personnes du clan Power en fin de compte. En tous cas, ici je n'avais plus d'amis, d'études, de travail, de petite amie, de famille, plus rien. C'était un véritable nouveau départ pour moi. Mais bon, j'avais des relations assez tendus avec mes parents alors pas besoin de vous expliquer qu'il m'avait coupé les vivres depuis longtemps et que sans boulot mon nouveau départ serait voué à l'échec. Avec mes notions en droit j'aurais probablement pu me dégoté un emploi comme assistant ou autre, mais je ne voulais rien qui ne soit lier au droit. Je détestais ça au point d'arrêter mes études et c'est en partie ça qui m'a fait partir de Chicago alors ce serait vraiment stupide que je bosse dans ce domaine pour mon nouveau départ. J'ai donc plutôt choisi de regarder pour des petits boulots. Mais c’était au salaire minimum ou en dessous et les boulots offerts étaient encore plus chiant que bosser dans le droit. J’ai donc cherché d’autres solutions, j’ai commencé à faire des spectacles d’humour dans des bars. Les payes n’étaient pas super, mais au moins je ne me faisais pas chier au boulot et l’alcool était gratis pour moi dans les bars en question. Le petit appartement que je louais bouffait déjà la moitié de ma paye et ça c'est sans compter la nourriture et toutes les petites choses dont j'avais besoin. Mon budget était serré. Néanmoins j'étais bien plus heureux qu'à l'époque où je vivais à Chicago, j'étais enfin maître de ma vie. La seule chose qui me manquait pour vivre une vie de rêve c'était Lizzie. Son absence pesait lourd sur mon moral, mais c’est surtout le fait qu’elle m’avait abandonné comme ça à la dernière minute après tout ce que moi j’avais sacrifié. J'allais devoir m'habituer à l’idée parce que je savais que je ne la reverrais probablement plus jamais. Malgré tout j'étais heureux dans mon minuscule appartement et la vie que je menais à Jersey. Je commençais d'ailleurs à me lier d'une certaine amitié pour mes voisins de palier. C'était un couple d'une trentaine d'années avec une petite fille de quelques semaines, De temps à autre ils me demandaient de la garder pendant qu'ils faisaient des sorties en amoureux. Ça ne me dérangeait, je ne sortais que les weekends. Au fur et à mesure que mon aide devenait plus fréquente ils commencèrent à me payer pour mes petites séances de gardiennage volontaire. Ce petit revenu supplémentaire me suffisait à avoir un train de vie décent même si j'étais seul, tout était parfait si on oubliait l'absence de Lizzie. Mais j'étais loin de me douter que d'autres revirements de situations m'attendaient...

Mon monde fut une nouvelle fois bouleversé par un beau soir en apparence comme tous les autres. Mon téléphone sonnait, ça m’avait réveillé moi qui dormais depuis des heures, car les fêtes auxquelles je m’étais présenté durant toute la semaine m’avaient épuisée. J’ai répondu bien évidemment, une voix paniquée me parlait, une voix que je reconnaissais très bien, car il s’agissait de ma sœur Lizzie. Après toutes ces années elle revenait vers moi et on dirait que c’était pour un problème? Je me disais qu’elle avait beaucoup de culot, mais la suite changea radicalement mon opinion. La situation était la suivante… en mon absence mon oncle et ma tente avaient rechutés, chose assez prévisible vous me direz, mais ils avaient emporté ma sœur avec eux. Sous l’effet de ma drogue ma sœur avait radicalement changé, elle commençait à coucher à droite et à gauche sans faire attention aux mecs et à la protection. C’est dans ces circonstances qu’elle était tombée enceinte d’un mec paumé et qu’elle m’avait appelé dès qu’elle l’avait su. Je ne comprenais pas trop où elle voulait en venir rendu-là, cet alors qu’elle me demanda de venir la rejoindre. Le mec l’avait bien évidemment abandonné et elle voulait mon support durant la grossesse, mais surtout, elle ne se sentait pas capable de prendre soin de l’enfant qu’elle allait avoir dans son état actuel. J’étais déchiré… j’en voulais beaucoup à ma sœur et je trouvais qu’elle était irresponsable de limite me demander d’être le père du gamin alors qu’elle continuerait de vivre ainsi. Mais malgré tout j’ai accédé à sa demande, je lui ai demandé où elle était et à ma grande surprise elle m’apprit qu’après que sa famille ait rechuté elle avait voulu aller à notre lieu de rêve et vivait donc à Jersey. En tous cas, la seule raison pour laquelle j’avais céder c’est que je ne voulais pas voir mon neveu avoir une vie misérable parce qu’il avait été élevé par une mère droguée qui se foutait complètement de lui… puis dans une moindre mesure parce que même si j’en voulais énormément à ma sœur je l’aimais toujours plus que n’importe qui d’autre sur terre. Bref, j’aurais surement pu attendre quelques mois avant de me pointer à l’adresse qu’elle m’avait donné, mais j’avais le pressentiment que vu sa situation elle était le genre à se faire expulser régulièrement alors je me suis dépêcher d’aller chez elle avant que les informations qu’elles m’avaient données ne soient plus d’actualité. J’ai poursuivi ma carrière d’humoriste, j’ai même participé à un festival Juste Pour Rire à Montréal, mais j’ai fini par me rediriger plus précisément dans la personnification. Je me suis aussi mis à écrire, j’essaie d’écrire des scénarios, avec un peu de chance j’en vendrai un à Hollywood et l’avenir de mon neveu et moi-même sera assuré. Quoi que ces temps-ci les adaptations de romans sont à la mode je devrais peut-être faire ça à la place. Dans tous les cas, m’occuper de ma sœur complètement paumée et de mon neveu ça fait partie de ma vie aujourd’hui. C’est parfois difficile de la conjuguer au reste de ma vie, mais je m’en sors plutôt bien jusqu’ici. La vie est courte et je compte bien la vivre au Max.