Oh oui, plus susceptible qu'elle, vous trouverez rarement. Il lui suffit d'une phrase pour qu'elle se vexe, mais généralement, ça passe en quelques instants, aussi vite que c'est venu. Un avantage. Elle lui avoue alors qu'elle a été abandonnée, encore une si petite enfant, sur le bord d'une route. Elle s'en souvient bien. C'est le seul souvenir qu'elle a de ses parents, elle ne saurait pas vous les décrire. Elle se souvient juste qu'il faisait nuit noire. Et que les phares s'éloignaient. Elle s'était mise à pleurer, seule livrée à n'importe qui. Disons qu'elle avait eu de la chance de ne pas tomber sur un détraquer. « Mon dieu mais c'est horrible, quel genre de personne peut être capable de faire subir ça à son propre enfant, c'est dégueulasse franchement. » Elle hausse les épaules, désinvolte, comme si ça ne lui faisait rien. « Quelqu'un qui, visiblement, ne me prenait pas pour son propre enfant. De toute façon, j'ai eu une bien meilleure vie après ça, alors... » Relativiser, positiver, aller de l'avant. Le mot d'ordre de Nevaeh, une sorte de religion, mais c'est grâce à ça qu'elle s'en est sortie. Elle soupire doucement, plongeant le nez dans son thé pour en avaler une longue gorgée.

De toute façon, c'est la seule chose que Loan lui ait appris : à positiver, toujours voir le meilleur, tirer profit des situations les plus défectueuses, les plus ingrates. Voir qu'il y a pire dans ce que l'on croyait être le pire. Alors elle a toujours vécu comme ça. « Si tu as été heureuse après alors c'était peut être mieux en effet, mais donc tu es arrivée dans le cirque à 5 ans ? Tu avais un numéro là-bas ? C'était quoi ? » Loin de se vexer, elle esquisse un fin sourire. Sa curiosité est légitime, et elle ne lui en veut pas de se poser toutes ces questions. Elle est ravie, même, de pouvoir parler de ça avec quelqu'un. Vu que généralement, elle ne révèle pas qu'elle a vécu dans un cirque, elle a peu l'occasion d'en parler réellement. « Oui, j'y suis arrivée à cinq ans, et j'ai grandi parmi eux. Il y a avait à peu près une centaine de saltimbanques, t'imagines ! » Elle prend une gorgée de son thé, ses yeux se mettant à briller grandement. Ses plus beaux souvenirs. « Dès mon intégration là-bas, Loan, le direction qui m'avait prise sous son aile, à tout de suite remarqué que j'avais un bon feeling avec les chevaux. Hors-scène, j'étais alors chargée de m'occuper d'eux, de les nourrir, voire de les soigner quand ça rentrait dans mes capacités, et de prendre soin d'eux dans le train. Et sur scène, j'avais le numéro d'acrobatie sur chevaux. » raconte-t-elle, rêveuse, son esprit à bien des lieues d'ici, au milieu des applaudissements, de l'adrénaline, de la vie, la vraie.